La loi Lamy de 2014 impose la création de conseil citoyen dans les quartiers prioritaires. A Fort-de-France, un ancien collectif du quartier Volga Plage, né après une catastrophe climatique, s’est…
La loi Lamy de 2014 impose la création de conseil citoyen dans les quartiers prioritaires. A Fort-de-France, un ancien collectif du quartier Volga Plage, né après une catastrophe climatique, s’est mué en conseil citoyen pour améliorer le quotidien des habitants de leur quartier. Plus qu’un simple groupe constitué pour respecter une loi, l’assemblée incarne l’Histoire du territoire. Retour sur un exemple de réussite et d’humanisme.
A Fort-de-France, le conseil est né dans la rue
Depuis la loi Lamy, des milliers de comités citoyens ont vu le jour dans les quartiers prioritaires. Loin de se limiter à la France métropolitaine, on peut en dénombrer une centaine dans les départements d’Outre-Mer. A Fort-de-France, en Martinique, le quartier Volga Plage possède un conseil présenté comme « exemplaire en termes de dynamisme et de participation citoyenne » par la plateforme de référence, conseilscitoyens.fr
Pour Anicet Soquet, dans un entretien relayé sur le site internet, ce n’est pas la loi de 2014 qui est à l’origine de leur projet mais l’ouragan Dean, qui a ravagé les Antilles en 2007. Cette catastrophe naturelle a contraint les habitants à s’organiser pour s’entraider et se porter secours mutuellement, révélant les prémices de ce qui allait finalement aboutir au conseil citoyen. La solidarité a créé une véritable dynamique citoyenne de quartier et fait prendre conscience aux habitants de leur vulnérabilité et de leur dépendance trop forte au service public.
La crise qu’a connue l’île en 2009, lors de la grève générale, n’a fait qu’entériner l’idée que les habitants devaient s’auto-organiser face aux difficultés. C’est ce qui a donné naissance au collectif Volga Plage Territoire Responsable en 2011 qui est devenu par la suite le Conseil citoyen Volga Plage en 2015.
Une mobilisation durable et engagée
Le Conseil citoyen de la Volga présente une démarche participative qui vise à impliquer le plus possible d’habitants du quartier dans les grandes décisions à prendre. C’est en ce sens que la charte a été écrite, comme le détaille Anicet Soquet : « Dans notre charte, nous avons inscrit le principe de démocratie comme fondamental. On a décidé que pour chaque question importante, comme la gestion de l’environnement, la régularisation des occupants sans titre, le transport, etc. on réunirait notre assemblée locale d’habitants et qu’à la suite, on ferait un vote en se prononçant au nom de la population. Les décisions doivent être votées à l’unanimité si la participation n’est pas massive (moins de 30 personnes). C’est une manière de procéder qui fait sens pour nous. ».
Pour sa création, le conseil a organisé une réunion publique pour présenter sa charte et élire le bureau. Puis, il a organisé un travail de consultation constante auprès des citoyens : « Le conseil citoyen a mis en place un forum tous les 15 jours sur les thématiques définies comme priorités dans le diagnostic partagé avec la ville. Sur chaque point, il y a eu une séance de travail avec la population et un vote pour chaque proposition. Entre 50 et 200 personnes se sont déplacées à chaque forum. »
Afin de mobiliser au maximum les citoyens, le conseil n’hésite pas à utiliser tous les moyens de communication disponibles. Les rencontres et réunions organisées donnent systématiquement lieu à un event Facebook, une distribution de flyer, une campagne d’affichage et de porte-à-porte.
Un conseil transversal et ambitieux
Avant même de se constituer en conseil citoyen, le collectif Volga Plage Territoire Responsable agissait pour le développement économique et social du quartier. Fort de son ancrage et de sa réputation, la ville de Fort-de-France a donné mandat au Conseil citoyen de Volga Plage pour animer une concertation citoyenne autour d’un grand projet d’aménagement. Du 4 novembre 2016 au 4 mai 2017, le Conseil citoyen a ainsi récolté l’avis des habitants et soumis un rapport de bilan à la commune.
Mais leurs actions ne se limitent pas à ce rôle de relais. Le Conseil citoyen a créé l’Agence de Développement Locale de Volga-Plage (ADLVP), une association qui regroupe habitants, Conseil citoyen et financeurs afin de réaliser le projet RESILIENCE. Celui-ci se constitue de deux chantiers principaux : la lutte contre l’habitat indigne et le ravalement de l’ensemble de la façade du quartier. Ces deux actions répondent à un double objectif puisqu’il vise la restauration du quartier mais aussi à fournir un emploi aux jeunes chômeurs, qui sont très nombreux. (NDLR : le taux de chômage des jeunes atteints 76% à la Volga Plage.)
Afin d’être compétents sur les sujets qui concernent le quartier, les conseillers n’hésitent pas à se former pour comprendre et assimiler toutes les problématiques, comme celle du logement par exemple. Anicet Soquet détaille cette démarche : « Tous les lundis matins nous avons un bureau projets où des techniciens des collectivités, de l’État, des administrations locales, ou des associations spécialisées viennent nous éclairer sur différents sujets. » Une implication qui fait la réussite de ce conseil.
Les conseils citoyens passent, comme dans ce cas, par une organisation concrète qui raconte l’Histoire du territoire. Plus qu’un lieu d’échanges entre administrés, cette assemblée apporte de l’intelligence aux politiques. A Fort-de-France, les élu.e.s ont donné.e.s la possibilité au groupe de travail de mener, eux aussi, des projets ambitieux. C’est fort de ces synergies que le conseil citoyen vit aux côtés et pour les administrés.
Que sont les conseils citoyens ?
La loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine impose la création des conseils citoyens dans les quartiers prioritaires afin de “conforter les dynamiques citoyennes existantes et de garantir les conditions nécessaires à la participation des habitants notamment dans toutes les instances de pilotage liées au contrat de ville“. Les conseils citoyens peuvent construire des projets pour renforcer le lien social dans les quartiers prioritaires grâce au fonds de participation des habitants qui est doté par l’État et les collectivités.
Pour constituer un conseil, les habitants sont tirés au sort, dans le respect de la parité. Ils peuvent participer à toutes les étapes d’élaboration du contrat de ville. Une réelle autonomie est laissée aux citoyens puisque les élus ne peuvent ni présider, ni animer ces conseils.
De nombreux outils sont proposés afin d’accompagner les conseils citoyens. Des ressources pour se documenter sont disponibles sur la plateforme conseilscitoyens.fr et sur le site du CGET. On peut y trouver une « boîte à outil », ainsi qu’un « support de communication » qui propose des plaquettes et des flyers pour expliquer la démarche du conseil citoyen. Il existe aussi un forum national des conseils citoyens, qui dispose d’une chaîne de vidéos. Vous pouvez aussi trouver la liste des conseils citoyens ici.