En Bretagne, à Augan, une coopérative a créé le Champ Commun, un espace qui réunit épicerie et bar. En huit ans, ce lieu a permis de redynamiser la commune rurale,…
En Bretagne, à Augan, une coopérative a créé le Champ Commun, un espace qui réunit épicerie et bar. En huit ans, ce lieu a permis de redynamiser la commune rurale, tout en étant rentable. Un brillant succès pas si étonnant.
Le Champ Commun, lieu de vie d’une commune rurale
Le Champ Commun, c’est à la fois une épicerie, un bar et un café. C’est surtout le lieu de rencontres et de vie d’un village breton, Augan, situé dans le Morbihan. Souffrant de la désertification rurale, comme malheureusement beaucoup de communes en France, les habitants d’Augan étaient auparavant contraints de faire leurs courses ailleurs, même si quelques commerces (une boulangerie, un restaurant, etc.) ont subsisté. Créé en 2010 par une coopérative, le Champ Commun a permis de redynamiser la commune, sans pour autant concurrencer ses autres commerces. Au contraire, l’ensemble se complète, et ce nouveau lieu a valorisé et renforcé l’artisanat local.
La coopérative, qui est à l’origine du projet, est née grâce à une dizaine d’habitants issus des milieux associatifs locaux. Ils ont, par la suite, monté ce projet de bar et d’épicerie ensemble et ont su le financer grâce à un appel à soutien, en mobilisant la population locale.
Redynamiser la commune
Si le projet du Champ Commun a su séduire tant de monde, c’est qu’il devait, avant tout, répondre au phénomène de zonage qui a pris de l’ampleur en Bretagne ; l’espace est séparé entre les zones industrielles, les zones commerciales et les lieux de vie. Pour Julien, l’un des responsables du projet, il fallait changer cette situation, comme il l’a confié à Jet FM : « Le premier but du Champ Commun, c’est vivre, travailler et pouvoir faire ses courses sur la commune afin d’éviter la zonification qui fait que les communes en milieu rural deviennent des cités dortoirs dans lesquelles les gens font leur nuit mais se lèvent le matin pour aller travailler à l’extérieur, font leur course à l’extérieur voire, pire, font leur loisir à l’extérieur ». Avec son bar et son épicerie, le Champ Commun réintroduit deux commerces qui faisaient défaut à la commune. Et en réunissant les deux dans un même espace, il permet aux habitants de se rencontrer en cassant les codes traditionnels de ces établissements. C’était aussi l’un des objectifs souhaités : « On avait aussi la volonté de faire le lien entre les générations, entre les personnes de différents milieux sociaux, de différents milieux culturels. »
Une réussite sociale, économique et culturelle
Ouvert maintenant depuis huit ans, le Champ Commun est devenu un lieu central dans la commune d’Augan. La population y fait ses courses et on peut y trouver aussi bien des produits bios et locaux, fournis par les producteurs du coin, que des produits traditionnels qu’on trouve d’ordinaire dans les supermarchés afin de correspondre à toutes les bourses. Le bar, qui s’est doté de sa brasserie artisanale, est le lieu de rendez-vous des associations locales ainsi que le principal lieu de vie culturelle de la commune grâce à ses nombreux événements culturels, là aussi hétéroclites, afin de correspondre à l’ensemble de la population.
Si le succès est au rendez-vous, c’est parce que le projet a su répondre aux attentes de la la population d’Augan, comme le confie Julien : « Une des choses qui a été très importante dans le projet Champ Commun, c’est que ça a été fait avec des habitants. Il y a eu un réinvestissement dans la commune, et dans un commerce, ce qui est apprécié par la population. » Et la réussite est telle qu’elle a permis à la coopérative de contribuer encore davantage à l’attractivité du territoire. En effet, depuis 2017, le Champ Commun a désormais une auberge afin d’accueillir les touristes dans la commune.
Un projet économiquement et socialement rentable
Ce qui fait la force de Champ Commun, c’est qu’il a su allier rentabilité économique et « rentabilité sociale » : « On n’est pas subventionné, ce qui nous oblige à avoir une économie qui nous permette de nous assurer sept salaires répartis sur l’épicerie, le bar, la brasserie et tout ce qui est administratif ». Juridiquement, la coopérative est une SCIC (société coopérative à intérêt collectif) qui compte 156 associés. Chaque adhérent, quelle que soit sa part, possède une voix, ce qui assure une réelle vision démocratique au sein du Champ Commun. Et si la rentabilité est bien présente, avec en 2015 plus de 678.000 euros de chiffre d’affaires, l’objectif est surtout d’assurer le dynamisme de la commune, sur le principe de la « rentabilité sociale ».
Avec une mise de fonds de 75.000 euros et 8.000 euros de subventions du Conseil Général du Morbihan, le projet est une franche réussite. En redynamisant efficacement une commune qui manquait d’attractivité, comme beaucoup de villages ruraux, le Champ Commun devrait servir de modèle à bien des communes. Un projet, finalement très simple selon Julien, qui reste modeste : « On n’a rien inventé, on a juste créé un bar en milieu rural. C’est bête comme tout. Aujourd’hui, il y a des personnes qui viennent nous voir en disant que nous sommes visionnaires alors qu’un bar du quotidien et une épicerie de base dans une commune, ça devrait exister partout ». Et il a bien raison.