Notre époque cherche généralement à valoriser les jeunes, au point de vouer un culte à la jeunesse avec, parfois, son lot de dérives. En revanche, alors qu’elle n’a jamais été…

Notre époque cherche généralement à valoriser les jeunes, au point de vouer un culte à la jeunesse avec, parfois, son lot de dérives. En revanche, alors qu’elle n’a jamais été aussi nombreuse, la population senior est souvent peu, voire mal, considérée. Pourtant, nos aînés ont un rôle à jouer pour la commune, autant que la commune à un rôle à jouer pour eux. Comment, alors, valoriser cette population ?

Une population importante à prendre en compte

Même si la France a un taux de natalité bien plus élevé que la moyenne d’Europe, elle n’échappe au vieillissement de sa population. Les Français de plus de 60 ans représentent désormais 25% de la population, soit plus de 13 millions de personnes. Et 9% des Français ont plus de 75 ans. Cette révolution démographique va se maintenir dans les décennies à venir et la pyramide des âges en France et en Europe tend à s’équilibrer.

Ce vieillissement de la population entraîne un constat qui peut paraître paradoxal : la condition de vie s’est grandement améliorée pour les seniors et retraités, ce qui explique leur dynamisme et l’augmentation de l’espérance de vie (les temps de retraites ont ainsi triplés) mais celle-ci, parce qu’elle s’est précisément allongée, retardent les problèmes liés à l’âge qui surviennent malgré tout.

Contrairement aux idées reçues, les seniors sont mobiles : plus de la moitié change de domicile une fois la retraite arrivée. Ce mouvement témoigne d’un héliotropisme chez cette population, puisque c’est le sud qui est privilégié et particulièrement le sud-est qui accueille 60 000 retraités chaque année sur la côte entre Nice et Perpignan. La région PACA a un million de retraités sur 5 millions d’habitants. Les retraités choisissent leur résidence parmi trois critères : ils privilégient soit leur région de vacance, soit leur région d’origine, soit un pays étranger. Les départements ruraux sont souvent favorisés tandis que les villes sont plus souvent délaissées. A Paris, par exemple, 50 000 nouveaux retraités quittent la capitale chaque année.

Cette population a des besoins spécifiques : elle nécessite des commerces de proximité, un accès aux soins, à la médecine et aux personnels de santé. Plus elle avance dans l’âge, plus elle se retrouve dépendante de sa famille et de la communauté. Dans les milieux ruraux isolés, elle se retrouve parfois divisée entre les seniors natifs du coin et ceux qui sont venus s’y installer. Un lien à établir est donc nécessaire entre la population senior entre elle, mais aussi avec les autres générations.

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La semaine bleue : 7 jours pour valoriser des actions sociales pour nos aînés

Du 2 au 8 octobre a lieu la semaine bleue, qui est une semaine nationale des retraités et personnes âgées. L’objectif, c’est de donner sept jours pour informer et sensibiliser l’opinion sur la question des personnes âgées. Pour cela, “cet événement est l’occasion pour les acteurs qui travaillent régulièrement auprès des aînés, d’organiser tout au long de la semaine des animations qui permettent de créer des liens entre générations en invitant le grand public à prendre conscience de la place et du rôle social que jouent les « vieux » dans notre société” , comme l’indique la présentation de l’événement qu’en fait le site officiel.

Cet événement organise un concours qui prime les meilleures initiatives. Cette année, c’est la ville de Nancy qui a remporté le Grand Prix décerné par la Fondation de France grâce à son projet : “La République à l’échelle de Notre Maison”. L’EHPAD Notre Maison a en effet organisé une expérience d’élection démocratique pour élire un gouvernement fictif. Les pensionnaires de l’EHPAD constituaient les candidats à élire, et ce sont des élèves de primaire qui jouaient le rôle des électeurs. La seconde place a été attribuée à la ville de Foix pour la réalisation d’un film intergénérationnel, “Ma place dans la société il y a cinquante ans et ma place aujourd’hui”. Ce documentaire, réalisé par des services civiques et des associations, se compose de plusieurs interviews de personnes âgées. La 3e place, “Quel cirque aux Charmilles !” est une rencontre entre des résidents d’un EHPAD et des artistes. Des échanges ont eu lieu en compagnie d’enfants du périscolaire et d’un institut d’éducation motrice.

Cette semaine bleue encourage aussi l’organisation de “marches bleues”. Ce sont des marches citoyennes qui réunissent des personnes âgées, des associations sportives et tous les citoyens qui le souhaitent. La semaine bleue, comme son nom l’indique ne dure que sept jours, mais l’organisation insiste sur l’importance de réaliser des actions en faveur des personnes âgées toute l’année. C’est d’ailleurs son slogan : “365 jours pour agir, 7 jours pour le dire”.

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Des actions concrètes pour améliorer la condition des personnes âgées tout au long de l’année

Il est essentiel d’organiser des actions sociales pour les seniors. On peut diviser celles-ci en plusieurs catégories :

  • Les actions symboliques : ce sont les repas et les rencontres organisés pour les anciens. Ils sont très importants pour maintenir un lien social et prévenir l’isolement.
  • Les actions d’accueil et d’informations : à travers les documentations, les espaces municipaux ou les sites internet, les communes délivrent des informations pratiques pour la vie des aînés. Certaines villes ont même créé des espaces dédiés aux seniors. Mais des moyens plus modernes sont parfois mis en place : à Bordeaux, par exemple, une page Facebook : « Bordeaux seniors » est mise à disposition. En PACA, c’est une publication “Seniors Région” qui est diffusée pour cette population.
  • Les animations et loisirs : l’aspect le plus important pour la population senior est de maintenir une vie sociale active. Certaines communes réalisent de véritables programmes saisonniers avec rencontres, visites, conférences, ateliers, et autres activités destinées aux retraités. Pour une programmation efficace, il faut bien connaître sa population et les besoins qu’elles demandent. En milieu rural, comme l’indique le rapport de la DREES sur l’action sociale pour les personnes âgées, des animations à domicile sont mises en place. Cela se fait par exemple à travers la livraison de livres à domicile. La Caisse centrale d’activités sociales est à l’origine de bon nombre de ces initiatives.
  • L’aide au maintien à domicile : cela correspond aux actions sociales destinées à lutter contre la dépendance comme l’allocation d’autonomie, les aides à domicile, la livraison de repas, etc.

Toutes ces actions permettent d’améliorer la vie de nos aînés. Mais il ne faut pas oublier la multiplicité de cette population qui attend des besoins différents. Pour répondre au mieux à ces attentes, Bordeaux distingue trois publics parmi les personnes âgées : « Les jeunes grands-parents » de 60 à 74 ans , plutôt actifs et consommateurs. Les « anciens » 75-84 ans qui ont besoin d’un accompagnement spécifique pour éviter l’isolement. Et « les grands aînés » : « ceux qui sont le plus souvent en situation de fragilité/dépendance/isolement et recoupent pour la collectivité les populations et les EHPAD et une gestion de la dépendance. » explique Michèle Walter-Canales au nom de la mairie de Bordeaux. Elle précise par ailleurs que la reconnaissance et la valorisation de cette population doit se réaliser sans isoler celle-ci du reste des habitants. Il ne faut pas séparer les aînés du reste de cette population mais au contraire mieux l’intégrer à travers des projets intergénérationnels.

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Les aînés, une richesse pour la commune souvent sous-exploitée

Si nos communes ont un rôle important à jouer pour améliorer la vie de nos aînés, il ne faut pas oublier que l’inverse est aussi vrai. Les seniors apportent une contribution essentielle pour nos villes, notamment en ce qui concerne l’aménagement urbain. Une ville accueillante pour les aînés, c’est une ville qui l’est pour l’ensemble de la population. En effet, certains enjeux se recoupent avec d’autres, comme par exemple l’accessibilité pour les personnes handicapées. Pour les petites communes, les seniors natifs jouent le rôle de mémoire du village et sont de véritables témoins de son évolution.

La question du logement est aussi importante. De nouveaux types d’habitats partagés voient le jour. C’est le cas de Chamarel-Les Barges, une coopérative qui a fondé un immeuble intergénérationnel à Vaulx-en-Velin. Se voulant coopératif et écologique, cet immeuble de 16 appartements avec de nombreuses parties communes et une gestion démocratique se présente comme une alternative à la maison de retraite. Plus répandu, de nombreuses associations mettent en relation des étudiants en manque de logement avec des personnes âgées isolées. Dès lors, une relation de partages et d’entraide intergénérationnel se nouent entre les deux parties. C’est une expérience bénéfique très souvent appréciée.

Les communes ont donc tout intérêt à prendre en compte leur population senior. Et pour obtenir directement l’avis des aînés, des “conseils des sages” se sont formés dans les communes, reprenant le modèle des conseils des jeunes. Cette pratique qui existe depuis 1989 et qui se développe de plus en plus, possède désormais une instance au niveau national. La Fédération des Villes et Conseil des Sages (FVCS) assure la promotion et l’organisation de ces conseils. Elle organise un congrès national chaque année et favorise le développement de cette pratique et de son réseau.

Les communes n’ont donc plus d’excuse pour ne pas prendre en compte nos aînés !

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