Légère hausse de la parité durant les dernières élections sénatoriales, mais l’égalité femmes-hommes est loin d’être acquise au Sénat.
Le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes vient de remettre son rapport sur la place des femmes au Sénat. Si les dernières élections sénatoriales ont montré une légère hausse de la parité, l’égalité des femmes et des hommes est loin d’être acquise au sein de la chambre haute du Parlement.
Une progression observée…
Les élections sénatoriales de 2017 auront vu la part des femmes légèrement en hausse par rapport aux scrutins précédents. Aujourd’hui, les femmes représentent 31,6% du Sénat, alors qu’elles n’étaient que 25% à l’issue des élections de 2014. Il faut rappeler que l’ensemble du Sénat n’a pas été renouvelé lors de ces élections qui concernaient précisément 171 sièges sur 348.
La part croissante des sénatrices a, avant tout, été initiée par le nombre plus important de femmes candidates. Sur les 1.996 candidats au Sénat, 45,5% étaient des femmes, contre 42,1% en 2014. Mais ce sont les élections qui montrent véritablement cette ascension : la part des femmes élues est de 32,9% alors qu’elle n’était que de 22,3% lors du scrutin précédent. Ainsi, au lendemain des élections, le Sénat compte 29,2% de sénatrices, soit 4 points de plus qu’en 2014. Finalement, cette part atteint les 31,6% suite à l’entrée en vigueur de la loi sur le cumul des mandats. Étant plus nombreux au Sénat, les démissionnaires sont majoritairement des hommes et, grâce à la parité des listes, sont remplacés par des femmes.
…mais la parité semble toujours loin
Pour le Haut Conseil à l’Egalité des femmes et des hommes, le constat est loin d’être réjouissant malgré cette évolution : « La part des femmes a donc légèrement progressé mais demeure trop basse. » Avant de dresser un constat plutôt inquiétant : « A ce rythme, il faudra attendre 2026 pour atteindre la parité au Sénat. » Le HCEfh met en évidence les manques et les défauts des modes de scrutin des sénatoriales. Pour le scrutin majoritaire qui concerne 34 sièges au Sénat, c’est l’absence de règles paritaires qui explique la disparité toujours importante entre les hommes et les femmes. Ainsi, pour ce scrutin, seul un candidat sur cinq est une femme.
Pour le scrutin proportionnel, bien plus important, car il concerne 138 sièges, c’est la stratégie des partis qui est à remettre en cause. Ils détourneraient les règles en favorisant les hommes pour les postes éligibles. Ainsi, « si la part des femmes élues est inférieure à celle des hommes, c’est surtout parce que les candidates n’étaient pas en position de gagner. » A cela s’ajoute la multiplication des listes dissidentes : les candidats hommes non investis par leur parti, se présentent sur une liste indépendante afin d’être élus ou réélus pour ensuite rejoindre à nouveau leur groupe politique initial. En dix ans, le nombre de candidats est ainsi passé de 754 en 2008 à 1.996 en 2017 et « les femmes ne représentaient qu’un quart des têtes de liste, limitant ainsi leur chance d’être élues. »
Une répartition des pouvoirs toujours en faveur des hommes
Mais la faible présence des femmes au Sénat n’est pas le seul problème épinglé par le Haut Conseil à l’Egalité des femmes et des hommes. Car, si la part des femmes a progressé lors des élections, le nombre de femmes au sein du bureau a diminué. En effet, les postes de pouvoir sont investis en grande majorité par des hommes. Premier constat : « le président du Sénat a toujours été un homme et le demeure ». Actuellement, les trois questeurs sont des hommes et pour les postes de vice-président, la disparité est aussi très forte : « sur les huit postes, seuls trois sont occupés par des femmes ». Enfin, seuls les postes de secrétaires semblent à peu près équilibrés, quoique toujours en faveur des hommes : six des quatorze postes sont occupés par des femmes. Révélatrice de cette disparité, la Conférence des présidents qui réunit « toutes les personnes occupant un poste de pouvoir au sein du Sénat » est composée aux deux tiers par des hommes.
Il existe aussi une répartition sexuée des postes dans les commissions. La seule où les femmes sont majoritaires (56%) est la commission des Affaires sociales. Elles sont plus d’un tiers dans les commissions sur les Affaires économiques (38,8%), sur les lois constitutionnelles (37,5%) et sur la Culture (35,4%). A l’inverse, elles sont très minoritaires au sein des commissions sur les Affaires étrangères (18,8%) et aux Finances (10,9%). Même constat pour les délégations, elles aussi très inégalitaires.
Quelles solutions ?
Pour améliorer la parité, le HCEfh propose plusieurs mesures qui devraient permettre d’améliorer sensiblement la place des femmes dans la chambre haute du Parlement. Premièrement, lors des élections sénatoriales, il préconise l’interdiction de rattachement d’un candidat à un parti ou un groupe politique qui ne l’a pas présenté. C’est une règle qui est déjà mise en place à l’Assemblée Nationale depuis 2014, et qui a fait ses preuves lors des législatives de 2017. Cela permet de contrer efficacement les règles anti-paritaires mises en place par les partis politiques. Car malheureusement, sans un appareil législatif contraignant, la parité ne progresse pas. C’était un constat partagé par la sénatrice Françoise Cartron qui déplorait déjà cette situation.
Autre mesure pour améliorer la place des femmes au sein du Sénat, le HCEfh propose d’ « harmoniser les règles de représentation de rapport en matière d’égalité femmes – hommes pour le Sénat avec celles prévues pour les communes et les intercommunalités de 20.000 habitants et plus, ainsi que pour les conseils départementaux et régionaux“. Concrètement, le président doit présenter « annuellement un rapport en matière d’égalité entre les femmes et les hommes intéressant le fonctionnement de l’assemblée, et présentant les politiques qu’elles mènent en interne et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. »
Troisième grande recommandation qui ne concerne pas que le Sénat, le HCEfh souhaiterait limiter le cumul des mandats parlementaires et des fonctions exécutives locales. On ne pourrait exercer au maximum que 3 mandats (consécutifs ou non) en tant que maire, président de conseil départemental, régional ou intercommunal, d’adjoint ou vice-président mais aussi en tant que député, sénateur ou député européen. Ceci afin de permettre le renouvellement régulier de la classe politique et donc favoriser la parité. Un ensemble de mesures qui pourrait s’avérer très efficace mais qui, pour l’instant, reste malheureusement à l’état de recommandation.