Corinne Lepage, députée européenne et Présidente de Cap 21, répond à nos questions sur l’innovation, l’écologie et la parité.     Elueslocales.fr : Bonjour Madame la députée, merci d’avoir accepté de…

Corinne Lepage
Corinne Lepage

Corinne Lepage, députée européenne et Présidente de Cap 21, répond à nos questions sur l’innovation, l’écologie et la parité.

 

 

Elueslocales.fr : Bonjour Madame la députée, merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Vous êtes une des premières personnalités politiques à vous être engagée pour l’écologie politique, et une des rares femmes à présider un parti politique. Avez-vous le sentiment d’avoir été une pionnière, aussi bien dans vos fonctions politiques que dans votre métier d’avocat ?

C. L. : Il serait présomptueux de considérer que j’ai été une pionnière de manière globale dans la mesure où des femmes avocates et des femmes politiques m’avaient précédé néanmoins, je pense avoir été une pionnière sur un certain nombre de démarches et de comportements. Tout d’abord en tant qu’avocate, avoir eu l’idée d’un cabinet d’avocat à la cour dédié au droit public et aux droits de l’environnement à un moment où cela représentait une innovation majeure. Nous l’avons eue Christian Huglo et moi-même. En tant que femme politique et avocate, je pense que j’ai innové sur la synthèse que j’ai cherchée tout au long de ma vie entre société civile et politique. En ayant maintenu une activité professionnelle réelle et conforme à la déontologie de l’avocature, j’ai assuré mon indépendance au regard de la politique et par voie de conséquence, j’ai pu faire primer ma cohérence et mes convictions sur le carriérisme habituel.

Elueslocales.fr : Quelles innovations avez-vous promues pour faire évoluer le droit de l’environnement ?

Tout d’abord, je n’ai jamais séparé le droit de l’environnement du droit commun d’une part, de l’évolution économique d’autre part. En second lieu, j’ai toujours accordé un soin tout particulier aux questions techniques et scientifiques pour aborder les questions juridiques. Enfin, j’ai toujours cherché à poser des questions simples ; par exemple, pour l’Erika j’ai eu l’idée de faire juger que les boulettes étaient des déchets ce qui permettait de contourner les exemptions de responsabilité qu’avaient obtenu les pétroliers. Mais de manière générale, c’est par la transversalité que j’ai pu contribuer à faire évoluer le droit.

Elueslocales.fr : Pensez-vous qu’il soit envisageable d’utiliser les mêmes méthodes pour promouvoir l’écologie et la parité ?

Ce sont deux domaines bien distincts. Mais, s’appuyer sur les faits pour démontrer la réalité et par voie de conséquence, démonter les mensonges qui évitent de changer la donne, est une stratégie qui peut être appliquée à l’un  et l’autre domaine.

Elueslocales.fr : Comment expliquez-vous qu’un tel décalage persiste entre le droit et les faits en matière d’écologie et d’égalité femmes-hommes ?

Tout simplement, parce ces deux sujets sont sans doute ceux qui structurent le plus le monde aujourd’hui. La crise écologique va générer et génère déjà une révolution économique qui va bouleverser les rapports de force.  L’égalité femmes-hommes est aujourd’hui non seulement un leurre mais un objectif qui, à l’échelle mondiale, s’éloigne. La revendication des femmes à l’égalité est un facteur révolutionnaire et ce n’est pas sans raison, qu’elles sont à ce stade les victimes des printemps arabes alors qu’elles en étaient des inspiratrices.

Autrement dit, égalité des genres et écologie sont les deux moteurs de transformation du monde en crise systémique dans lequel nous vivons et que combattent vigoureusement, les bénéficiaires du système ancien.

Elueslocales.fr : Estimez-vous que l’Union européenne soit en pointe dans ces deux domaines ?

L’Union européenne est très active dans les deux champs …au moins dans les textes, mais la réalité diffère. Si le Parlement européen compte 40% de femmes, les autres institutions sont très masculines. Et pourtant, l’égalité est un principe communautaire. De même, sur le plan du droit de l’environnement, les textes sont très ambitieux. La réalité de leur application est autre.

Elueslocales.fr : En quoi l’enjeu de la parité est-il essentiel pour l’Union en tant que valeur ?

La parité est un concept efficient à mes yeux. Il est essentiel pour l’Union Européenne parce qu’il poursuit la conquête des droits humains qui sont au cœur du projet européen. Mais aussi, parce que la défense des femmes est un sujet de politique internationale.  La délivrance du prix Sakharov l’atteste.
Elueslocales.fr : Quel regard portez-vous sur la parité en politique en France ?

Elle a progressé avec l’élection de François Hollande, mais elles reste insuffisante au parlement, dans les instances de régulation, dans la haute fonction publique. Et bien entendu, dans le secteur privé, le plafond de verre subsiste.

Elueslocales.fr : Quels sont vos engagements et aspirations en faveur de la parité en politique ?

Je défends la parité pas seulement par souci d’égalité mais aussi comme le moyen le plus opérationnel pour apporter de meilleures réponses à nos problèmes et assurer le renouvellement de la classe politique.

Elueslocales.fr : Que tirez-vous de votre expérience de femme dans des milieux d’hommes ?

Tout d’abord, tout ce qui a été dit sur le fait qu’une femme a plus à prouver qu’un homme est parfaitement exact. Ensuite, il existe un système non-écrit de connivence entre les hommes y compris pour promouvoir des « femmes de paille » qui ne leur feront aucune ombre et au contraire défendront leur pouvoir. La promotion canapé reste une coutume bien ancrée dans le monde politique y compris chez ceux qui revendiquent de faire de la politique autrement.  Enfin, les femmes doivent s’entraider pour conquérir un pouvoir qui reste masculin.

Merci pour ces réponses !