À Creil, dans l’Oise, l’agglomération mène une lutte active pour mettre fin aux logements et habitats insalubres ou dangereux
Fin 2018, une proposition de loi a été déposée par des sénateurs pour améliorer la lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux. L’objectif est de durcir des dispositifs existants pour réussir à réellement “renforcer les capacités de contrôle et d’intervention des collectivités territoriales et de leurs groupements”.
À Creil, dans l’Oise, l’agglomération prend les choses en main depuis 2009 et mène une lutte active pour mettre fin aux logements insalubres.
Un service insalubrité intercommunal
L’agglomération creilloise est située à 30 minutes de Paris, et les loyers sont en moyenne 30% moins chers. Dans ce contexte, les locataires sont prêt.e.s à accepter des conditions dégradées d’habitat, et rechignent à dénoncer les propriétaires une fois le constat fait de l’insalubrité du logement. La problématique des logements indignes et dangereux est donc particulièrement prégnante au sein de l’agglomération.
Un diagnostic de l’habitat dégradé a été effectué et a permis de constater que 12% du parc privé était potentiellement indigne, contre 2.8% au niveau départemental et 2% au niveau national.
La Communauté d’Agglomération Creil Sud Oise (ACSO), qui a la compétence habitat, s’est dotée dès 2009 d’un Service salubrité de l’habitat. Avec en moyenne 90 dossiers par an reçus depuis 2009, la plainte émanant essentiellement des locataires (70% des demandes), le service a rapidement constaté qu’il était nécessaire de multiplier les méthodes pour repérer les logements problématiques. Le problème principal de la lutte contre l’habitat indigne réside en effet en la difficulté de repérer les logements insalubres et dangereux. Avant d’inciter les propriétaires à mettre aux normes leurs logements, il est essentiel de connaître finement les conditions réelles de mise en location du parc privé.
Pour pallier les difficultés liées au manque d’information, le Service salubrité de l’habitat redouble d’effort. “lls doivent ruser”, expliquait au Parisien le Président d’agglomération Jean-Claude Villemain, “comme repérer les noms sur les boîtes aux lettres qui augmentent ou encore des annonces de location sur Leboncoin”.
Les outils de la loi ALUR mobilisés
L’ACSO s’est ainsi saisie des trois dispositifs proposés dans la loi relative à l’Accès au Logement et à l’Urbanisme Rénové (ALUR) du 24 mars 2014, qui sont déployés indépendamment les uns des autres et qui ne peuvent concerner que certaines rues, pour tout ou partie.
La déclaration préalable de mise en location, qui concerne environ 5.000 logements, est obligatoire pour toute nouvelle mise en location et tout changement de locataire. L’autorisation préalable de mise en location, qui concerne environ 800 logements sur le territoire, est également obligatoire pour toute nouvelle mise en location ou changement de locataire. Elle peut donner lieu à une visite du logement par les services de la commune concernée, qui décideront, en fonction de l’état du logement, de l’autorisation ou du refus de la mise en location. Enfin, l’autorisation préalable de travaux, ou “permis de diviser”, est obligatoire pour les propriétaires souhaitant diviser une maison ou un immeuble. Ce dispositif concerne environ 4.000 logements sur le territoire.
En cas de non-respect de ces obligations, les propriétaires s’exposent à des amendes qui seront reversées à l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH), missionnée pour améliorer le parc existant de logements privés. Ces amendes s’élèvent à 5.000 euros pour non-respect de la déclaration et l’autorisation préalables de mise location, et à 15.000 euros pour non-respect du permis de diviser.
Un cadre législatif en évolution
Les dispositifs proposés dans la loi ALUR sont en passe d’évoluer vers un durcissement des obligations pour les propriétaires. Dans la proposition de loi faite au Sénat, il est en effet proposé de soumettre à autorisation préalable toutes les opérations qui tendent à diviser un logement en plusieurs logements.
Autre proposition pour les permis de louer : celle de remplacer la décision implicite d’acceptation en cas d’absence de réponse du maire, par une décision implicite de refus “après deux mois de silence”. Sont également proposés la possibilité d’exproprier au motif que le propriétaire refuse de résoudre une situation d’insalubrité jugée remédiable, et le durcissement des sanctions à l’égard des personnes qui ne respectent pas l’obligation de déclaration de mise en location, ou celle de disposer d’un permis de louer.
Autant de moyens qui devraient permettre à l’ACSO, et aux collectivités qui souhaitent se saisir de la problématique de l’habitat indigne, de veiller à la qualité des logements locatifs et d’enrichir l’observation de l’habitat.