La loi NOTRe a fortement participé à la récente mutation des territoires. Parmi les changements mis en place, les transferts de compétences sont nombreux. L’une des dernières en date, la…

La loi NOTRe a fortement participé à la récente mutation des territoires. Parmi les changements mis en place, les transferts de compétences sont nombreux. L’une des dernières en date, la compétence tourisme – des communes aux EPCI – porte une nouvelle organisation territoriale pour les littoraux notamment. Le renforcement de l’intercommunalité sur ces sujets engendre une adaptation politique et institutionnelle qui n’est pas sans conséquence. Dans certaines communes et intercommunalités, comme à la Baule-Escoublac, le transfert s’est fait avec la volonté de saisir cette opportunité pour engager un développement touristique ambitieux pour tout le territoire et la traduire en véritable chance.

Compétence tourisme : une opportunité pour l’intercommunalité

“La promotion du tourisme, dont la création d’office de tourisme” (art. L. 134-1) est devenue en 2017 une compétence intercommunale. Cette modification implique pour les EPCI la prise en charge de la création, la promotion, l’aménagement, la gestion et l’entretien des zones d’activités touristiques. Seule l’animation touristique n’est pas transférée et peut-être encore gérée par les communes.

La mutualisation des offices de tourisme traite la compétence à un échelon territorial plus pertinent et en lien direct avec les autres transferts. En 2017 aussi, le développement économique devient compétence intercommunale et s’organise de pair avec l’activité touristique du bassin de vie. Une logique traitée par l’Etat et qui doit s’appliquer maintenant aux territoires.

En France, certains élus municipaux ont vu avec ce transfert, une crainte pour la sauvegarde des projets touristiques, dès lors que la compétence passe à l’échelon intercommunal. A la Baule-Escoublac, c’est le contraire qui s’est amorcé dès 2015 : les territoires de l’intercommunalité ont engagé une réflexion commune pour valoriser leurs atouts touristiques. Une réflexion tripartite – entre les élus, les services et le cabinet KPMG – a débuté à cette date sous forme de travail collaboratif et a défini une politique touristique sur le territoire. L’organisation de cette compétence en était le fil conducteur des échanges. Très rapidement, l’envie d’assurer l’outil le plus pertinent s’est détachée des débats. « Les réflexions se sont axées autour de la mission du service public avec la volonté de trouver une solution efficiente pour l’ensemble du territoire littoral et rétro-littoral » nous explique Laetitia Remoissenet, Manager du Service Public Ouest chez KPMG. Avant de reprendre « C’est l’opportunité qu’ont saisie les élus. Avec cette réflexion, nous avons organisé le travail de la manière suivante : mutualiser tous les offices de tourisme pour organiser une nouvelle gouvernance en faveur de la promotion du territoire. » Marina Eonnet, DGA à la Mairie de la Baule-Escoublac complète : « la première réflexion des élus de la municipalité a été celle relative à la possibilité pour la Baule-Escoublac de maintenir un office de tourisme distinct. Cette éventualité n’a pas été retenue car la ville a souhaité accompagner la dynamique touristique globale du territoire ».

Les élus locaux y ont vu une formidable chance pour l’attractivité économique de La Baule-Escoublac et le littoral associé. La loi leur laissait la possibilité de conserver les offices de tourisme, « mais les élus ont arbitré et considéré que le service public serait mieux assuré en développant une SPL (Société Publique Locale) plutôt qu’en ayant une dizaine d’OT qui avait toutes des façons de fonctionner différentes » précise Laetitia Remoissenet. « Pour eux, le plus important est de faire connaître l’ensemble des destinations du territoire. Les élus avaient à cœur cette vision territoriale du tourisme en lien avec le développement économique ». Regroupement de onze offices de tourisme de la presqu’île guérandaise et du pôle tourisme de Cap Atlantique, cette SPL baptisée Bretagne Plein Sud remplit la double mission d’office de tourisme intercommunal (OTI) et d’outil support de promotion de la Destination et du Parc naturel régional de Brière avec le développement de l’animation touristique.

Pour changer d’outil touristique : concerter, analyser, chiffrer et remettre en question

Conséquence directe de ce travail collaboratif et intercommunal : le changement opéré sur le territoire a bouleversé les organisations à l’échelle communale, et la ville de la Baule-Escoublac a fait le choix d’évaluer et de remettre en question nombre de ses animations touristiques.

Marina Eonnet, actuellement DGA à la Mairie et qui a suivi cette mise en place de près, explique le processus. « Le transfert de compétences s’est fait dans la concertation et l’échange. Les enjeux ont été identifiés et analysés afin d’organiser la compétence tourisme sur le territoire dans les meilleures conditions ». En effet, dans le cas d’un déploiement et/ou d’une mutualisation, il est nécessaire de prendre en compte tous les acteurs qui agissent pour la compétence : offices de tourisme, salariés, associations, collectivités et élus.

La concertation a été plébiscitée comme une étape incontournable permettant de définir un projet de territoire. Afin de mener à bien ce travail, le cabinet KPMG est intervenu en amont et a réalisé « une analyse financière et organisationnelle de chaque animation ». Cette dernière a permis au groupe de travail de repenser chaque manifestation et d’aller au-delà en évaluant « l’ensemble des charges affectées à la compétence tourisme » sous un regard neutre. Ce travail, mené par les services territoriaux et le cabinet KPMG, donne la possibilité aux élus de prendre de la distance avec les actions portées jusque-là et d’aborder la question, souvent épineuse, de leur maintien ou annulation. Ce sont aussi ces analyses – faites par un prestataire externe – qui mettent en exergue les pistes d’amélioration à envisager par l’intercommunalité.

la Baule-Escoublac - Bretagne Plein Sud
© Bretagne Plein Sud

Par ailleurs, quand le maintien des locaux des services touristiques est organisé, la problématique tient dans leurs transferts et souvent, il faut savoir jongler avec les possibilités légales. Comme l’explique Marina Eonnet : « La difficulté porte sur les montages juridiques : faut-il organiser un transfert de plein droit ? Une convention de mise à disposition ? En fonction des sites, la Communauté d’Agglomération CAP Atlantique a été obligée de déployer les deux possibilités ». Dans ce contexte, l’accompagnement et l’encadrement juridiques sont primordiaux et permettent aux agents et aux élus d’avancer sereinement pour un projet de territoire sans se focaliser sur la technicité légale.

Deux facteurs de réussite au transfert : le temps et l’humain

Pour accompagner le transfert, la notion de temps est centrale dans le fonctionnement des collectivités puisqu’elle permet d’organiser le service public avec plus de recul. Seule, une analyse de l’environnement n’est donc pas suffisante, il faut aussi permettre aux services de se familiariser à la nouveauté.
A la Baule-Escoublac, « une période transitoire de 2 ans a été préconisée » par KPMG en accord avec les élus et les services, qui a permis le lissage des organisations et la nouvelle mise en place de l’organigramme. Dans ce cas, la réorganisation des services a été engagée laissant la place à la SPL d’impulser la nouvelle dynamique souhaitée auprès des communes de l’intercommunalité et discuter avec elles du développement ou du renforcement des activités locales.

Bretagne Plein Sud
© Bretagne Plein Sud

Autre prérogative pour un transfert qui se fait avec succès : l’intégration des ressources humaines. Comme l’exprime Marina Eonnet, « la nouvelle organisation, les nouvelles méthodes de travail ‘perturbent’ aussi les salariés et il convient de les accompagner au mieux dans ce changement ». Plusieurs aspects peuvent être abordés, par exemple, « une démarche bien-être au travail permet d’accompagner et de rassurer ». Parallèlement, des contraintes légales viennent ajouter de la rigueur. Il faut « penser au transfert des contrats de travail et à la nécessaire harmonisation des pratiques salariales, tant au niveau des congés, du temps de travail, des horaires d’ouverture, etc. Il est donc important d’anticiper ». Dès lors que l’humain entre en jeu, le temps est, là aussi, indispensable à la réussite des politiques menées en interne et un atout à ne pas ignorer.

La compétence tourisme est ainsi en cours de transfert dans nombre de communes et d’intercommunalités depuis le 1er janvier. Cet aménagement des politiques est souvent complexe et les collectivités peinent à assumer l’ensemble des rôles nécessaires à un transfert de compétences comme la connaissance juridique, l’accompagnement des ressources humaines ou encore la vision politique à plusieurs décennies. C’est dans ce contexte que certaines font le choix de déléguer les missions les plus techniques pour se focaliser sur leurs attributions : la politique locale, l’histoire du territoire et l’accompagnement au changement de ces derniers. A la Baule-Escoublac, cet accompagnement a été bénéfique et les intérêts ont été observés par l’ensemble des acteurs engagés.

Cet article a été rédigé en partenariat avec KPMG.