Un récent sondage de l’institut CSA Research (institut de référence des études marketing et d’opinion depuis 40 ans) pour le Ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des Femmes…
Un récent sondage de l’institut CSA Research (institut de référence des études marketing et d’opinion depuis 40 ans) pour le Ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des Femmes laisserait entrevoir un possible recul du sexisme en France. Alors, bien évidemment, la situation reste vraiment guère reluisante mais, après de multiples constats pessimistes, essayons pour une fois de voir le verre à moitié plein.
Le sondage, axé sur la problématique « Perceptions de l’égalité entre les femmes et les hommes en France », a été effectué du 22 au 28 août 2016 et a essayé de croiser les opinions de 1 001 hommes âgés de 15 ans et plus, 1 259 femmes âgées de 15 ans et plus, mais aussi un focus sur un échantillon de 327 femmes âgées de 15 à 20 ans.
- Le sexisme, encore et toujours omniprésent
- De l’agression aux changements de comportement
- Des clichés qui figent les préjugés
- Une mentalité qui évolue chez les hommes ?
Le sexisme, encore et toujours omniprésent
4 femmes interrogées sur 10 ont déclaré avoir été récemment victimes d’une injustice ou d’une humiliation parce qu’elles sont des femmes ! Et chiffres renforçant le cliché de la jeune fille, « proie attirante », 50 % des jeunes filles de 15 à 20 ans ont déclaré la même chose, le chiffre montant à 61 % concernant les étudiantes.
Où ? Surtout dans la rue et l’espace public, continuant à les souligner comme des espaces hostiles aux femmes (23 % et 15 % concernant l’ensemble des femmes, et des chiffres similaires pour les jeunes femmes précisément). Evidemment, se situent en tête l’endroit où elles vivent le plus : le monde professionnel pour l’ensemble des femmes (38 % voire 46 % pour celles travaillant à temps plein) ou le milieu scolaire (28 % pour les jeunes filles montant à 50 % pour les lycéennes). En soi, si ces chiffres ne sont guère surprenants, ils indiquent tristement que, malgré la succession de campagnes de sensibilisation, les femmes ne sont pratiquement jamais à l’abri, que ce soit au travail, à l’école ou dans l’espace public.
Chiffres plus surprenant, les transports en commun sont relativement peu cités : entre 7 et 8 % (signe que certaines campagnes portent enfin leurs fruits ?). En revanche gros carton jaune à la région Île-de-France avec un très moche 21 %…
De l’agression aux changements de comportement
Si la proportion d’actes émanant d’un inconnu est conséquente (entre 42 et 43 %), c’est l’entourage des victimes qui est principalement montré du doigt : entre 51 % et 56 % des actes sexistes émaneraient de l’entourage (relativement proche) dont 26 % à 28 % d’un collègue ou d’un camarade. Cassant un peu le cliché du supérieur profitant de sa position, “seulement” 6 % de ces actes seraient l’œuvre d’un supérieur hiérarchique.
Si 49 % des femmes interrogées (et même 57 % concernant seulement les 35-49 ans) ont déjà subi des « remarques embarrassantes ou très embarrassantes (sur sa tenue ou son physique notamment) sur son lieu de travail de la part d’un(e) client, d’un(e) collègue, d’un(e) supérieur hiérarchique », chiffre hélas guère surprenant, presque 30 % des hommes interrogés (28 %, et même 34 % pour les jeunes hommes de moins de 35 ans) témoignent avoir subi ce même type de situation (il est dommage que l’étude ne précise pas de qui émanait ces remarques, d’un autre homme ou d’une femme).
Chiffres assez consternants, 23 % des femmes interrogées ont déjà reçu des « propositions sexuelles insistantes de la part d’un(e) collègue, client(e) ou supérieur(e) hiérarchique, soit plus de 2 femmes sur 10.
Et pour 15 %, le pas a été franchi ou presque, témoignant qu’« un-e client-e, un-e collègue, un-e supérieur-e hiérarchique a déjà touché ou essayé de toucher certaines parties de leur corps contre leur gré ».
Si les chiffres sont moindres concernant les hommes, ils n’en sont pas moins notables : 12 % ont reçu des propositions insistantes d’ordre sexuel et 9% ont été touchés ou il y a eu tentative. Là encore, l’étude n’indiquant pas l’auteur(e) des propositions et/ou gestes, difficile de tirer des conclusions sinon que la problématique ne touche pas que les femmes…
Dès lors, triste conséquence, on assiste à des changements de comportement et la généralisation d’attitudes dites d’évitement surtout chez les jeunes filles. Ainsi, 63 % des femmes sondées ont témoigné avoir modifié leur comportement par peur de réactions sexistes (72 % pour les jeunes femmes), ce qui se traduit par la décision de ne plus porter certains vêtements et/ou d’éviter de fréquenter certains lieux publics ou événements.
Des clichés qui figent les préjugés
Si l’étude pointe du doigt la publicité donnant des complexes aux femmes, il n’est guère téméraire de s’aventurer à accuser également de nombreuses émissions de téléréalité (mais pas que…), des films ou de nombreux clips véhiculant des images des femmes peu similaires aux femmes « ordinaires » et des stéréotypes persistants. Ainsi, 82 % des femmes interrogées s’accordent à confirmer que la publicité véhicule une image qui donne des complexes aux femmes (77 % pour les 15-20 ans), mais cette vision n’est pas genrée étant donné que plus de 70 % des hommes interrogés estiment également que la publicité est en cause.
Les clichés persistent aussi à l’approche de l’école : même si dans chaque filière, la réponse « les filles et les garçons ont autant de chances de réussite » arrive en 1e position (donnée non négligeable, relativement encourageante), 34 % des femmes et des hommes estiment que les filles ont plus de chances de réussite que les hommes dans les filières littéraires. C’est le même constat dans une filière artistique (24 % selon les femmes interrogées, 32 % pour les hommes).
Clichés toujours persistants (mais arrivant toujours second), les garçons ont davantage de chances de réussite dans les filières scientifiques (31 % des femmes l’indiquent, 25 % des hommes), technologiques (45 % des interrogées, 44% des hommes) et sportives (46 % et 42 %). On le voit dans ces 3 types de filières, ce sont à chaque fois les femmes qui estiment avoir moins de chances de réussite qu’un homme, d’où un certain immobilisme dans les mentalités qui se retrouvent dans les conseils d’orientation.
Une mentalité qui évolue chez les hommes ?
Alors que 57 % des femmes (61 % des 15-20 ans) se disent féministes, 45 % des hommes interrogés affirment l’être également (il est dommage qu’il n’y ait pas eu une loupe sur les jeunes, cela aurait pu être un chiffre intéressant), le chiffre n’est certes pas à sauter au plafond mais n’est pas non plus à négliger.
79 % des femmes, 84 % des jeunes femmes, mais aussi 71 % des hommes estiment que le combat du féminisme reste utile, on note donc l’arrivée massive d’une génération de jeunes filles/femmes farouchement convaincues de l’importance de cette lutte (50 % de ces jeunes sondées se disent même « tout à fait d’accord » contre 39 % des femmes plus âgées). Si le nombre d’hommes également convaincus par ces revendications progressent, il est bien possible que l’on marche vers de futures améliorations de l’égalité femmes-hommes.
D’autant plus que l’on peut observer une certaine prise de conscience des jeunes : 67 % des hommes de moins de 25 ans estiment ainsi que le combat du féminisme et la lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes concernent aussi bien les hommes que les femmes (76% des hommes interrogés en général expriment la même chose).
Cependant, une opposition existe toujours alors que 53 % des hommes interrogés estiment que le sujet des injustices liées au sexisme est suffisamment abordé (10 % estiment qu’il est même trop présent, un chiffre similaire chez les femmes (9%) mais pas chez les jeunes femmes (5%)), alors qu’entre 53 % et 55 % des femmes estiment au contraire que l’on en parle pas assez.
Ainsi, si l’on peut noter quelques signes encourageants, dont une possible grandissante prise de conscience des hommes, il reste encore beaucoup de travail avant d’atteindre une réelle égalité femmes-hommes dans la société française.