L’économie circulaire fait de plus en plus parler d’elle. Les responsables politiques nationaux ou locaux en vantent publiquement les mérites, et mettent notamment en avant les bénéfices environnementaux. Le concept…
L’économie circulaire fait de plus en plus parler d’elle. Les responsables politiques nationaux ou locaux en vantent publiquement les mérites, et mettent notamment en avant les bénéfices environnementaux. Le concept prend de l’ampleur dans les législations nationales et européennes, avec par exemple la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015, la feuille de route sur l’économie circulaire (Frec) sortie en avril 2018, ou encore le paquet européen sur l’économie circulaire approuvé par les Etats membres fin mai.
L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (Ademe) doit quant à elle présenter en janvier 2019 un label visant à valoriser les collectivités engagées dans des démarches de ce type.
Recycler pour créer de la valeur
L’idée sous-jacente est en effet séduisante : grâce à l’économie circulaire, on sort du modèle linéaire “extraire-produire-consommer-jeter”, pour un modèle cyclique prenant les déchets comme de potentielles ressources ; on passe d’une économie de stocks à une économie de flux, d’un système de possession à un système d’utilisation.
Quand on parle d’économie circulaire, on pense au recyclage des déchets : poussé à son maximum, ce mécanisme permettrait à tout le monde de consommer sans que cette consommation – hormis la première – ait nécessité une extraction de ressources, les ressources nécessaires provenant de déchets recyclés. Notons néanmoins à ce stade que le recyclage n’est pas possible à l’infini, et qu”il ne nous permettra jamais de maintenir nos niveaux de consommation actuels au vu des limites naturelles que nous rencontrons dans l’extraction des ressources.
D’abord, nous n’utilisons pas tous les métaux sous leur forme métallique, puisque nous les utilisons aussi parfois sous leur forme chimique, et leur usage disperse les éléments constitutifs de ce produit dans l’environnement ; c’est ce qu’on appelle l’usage dispersif. Ensuite, l’usage d’un objet s’accompagne quasi-systématiquement d’une dégradation liée au fait que sa construction a nécessité l’alliage de plusieurs matériaux, qui une fois fondus ne peuvent être récupérés séparément. Ces deux phénomènes empêchent le 100% recyclage, et impliquent de repenser les systèmes de production en amont.
Heureusement, l’économie circulaire ne s’arrête pas au recyclage et à l’optimisation des déchets, mais recouvre un ensemble plus vaste de domaines d’action pour les collectivités.
Un principe idéal pour les acteurs publics
La feuille de route sortie en avril insistait sur le rôle à jouer des collectivités pour parvenir au 100% circulaire et finir de “réconcilier l’économie avec l’environnement”. Une étude publiée début novembre par la Gazette des Communes en partenariat avec Nexity montrait que 54% des élu.e.s locaux.ales interrogé.e.s estimaient “avoir entamé une démarche qui s’inscrit dans une logique d’économie circulaire”, et seulement 9% “n’avaient pas prévu de s’en préoccuper”. Selon cette même enquête, 57% citent le niveau intercommunal quand on leur demande qui doit prioritairement impulser la transition vers l’économie circulaire, 44% citent l’Etat, et 39% citent la commune (plusieurs réponses possibles). Les collectivités ont donc un rôle à jouer.
La Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD) s’est saisie de cet enjeu. Cette intercommunalité de 200.000 habitants, dans le département du Nord, souhaite devenir la première à obtenir le label “Cit’ergie” de l’économie circulaire, dont le lancement est prévu pour janvier 2019. Ce label sera attribué aux collectivités selon leur capacité à prendre en compte les sept piliers de l’économie circulaire : le recyclage, mais aussi l’approvisionnement, l’écoconception, l’écologie industrielle, l’économie de la fonctionnalité, la consommation et la durée d’usage. Autrement dit, tous les stades du cycle de vie des produits sont concernés. Ces sept piliers, comme schématisés ci-dessous, sont regroupés en 3 domaines : la gestion des déchets, l’offre des acteurs économiques, et la demande et le comportement des consommateurs.
La CUD, déjà remarquée pour sa politique énergétique, veut profiter du dispositif pour développer la coopération entre ses différents services et adopter une politique d’économie circulaire cohérente.
Économie circulaire = croissance verte
Considérés ensemble, l’évaluation des actions locales dans ces sept domaines d’action permettrait de “mesurer” la circularité d’une économie locale. Néanmoins, il faudrait à cela ajouter une mesure de la croissance des flux – en intrants et en extrants, autrement dit ce qui rentre et ce qui sort – du territoire, indispensable à la mesure d’une circularité authentique : pour réduire les perturbations environnementales liées aux flux, il faut réduire les flux, c’est-à-dire la consommation et la production.
D’où l’appel de certains chercheurs à remettre en cause la croissance comme principe d’organisation de l’économie, et à assumer la rupture entre économie circulaire – authentique – et croissance verte, qui vont dans deux sens opposés.