Rénovation des bâtiments existants et besoin de nouveaux bâtiments performants s’accompagnent d’une augmentation des exigences dans le bâti. Après les normes BBC, l’expérimentation du label Energie Carbone vise à instaurer…

Rénovation des bâtiments existants et besoin de nouveaux bâtiments performants s’accompagnent d’une augmentation des exigences dans le bâti. Après les normes BBC, l’expérimentation du label Energie Carbone vise à instaurer la nouvelle norme de construction.

Un Label encore au stade expérimental

L’accord de Paris sur le climat et de la loi de transition énergétique pour la croissance verte prévoit, à l’horizon 2018, la mise en place d’un standard environnemental unique au monde pour les bâtiments neufs, Ségolène Royal et Emmanuelle Cosse ont lancé en novembre 2016 l’expérimentation du label « Bâtiments à Energie Positive & Réduction Carbone ». En ligne de mire : anticiper ce changement et élaborer une norme ambitieuse.

En effet, Isabelle Moulin, directrice de l’Environnement et des moyens techniques à Malaunay, nous explique ainsi que « le label Energie positive et réduction carbone, c’est ce qui va venir dessiner la nouvelle réglementation et, comme souvent, il y a des organismes sélectionnés par l’Etat – comme l’ADEME – qui sont chargés de suivre des dossiers un petit peu exemplaires pour voir si c’est applicable et si, sur le terrain, on peut mettre en place ces exigences-là. L’expérimentation, cela permet de vérifier si la théorie est applicable ».


A Malaunay (76), la ville a déjà vu deux projets labellisés : la résidence Alizari, projet de logements sociaux construits pour le compte d’Habitat 76 et soutenu par la municipalité et le Themis, immeuble de bureaux de 10 655 m² situé sur la ZAC Clichy-Batignolles (Paris 17ème) et développé par Paris Batignolles Aménagement.


A l’heure actuelle, le label en est toujours au stade de l’expérimentation. Sept projets ont ainsi été déjà labellisés, des maisons individuelles issues de projets de particuliers mais aussi des résidences construites par des bailleurs sociaux soutenus par des collectivités, permettant ainsi de tester les critères de labellisation et les exigences de qualité dans différentes configurations.

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Comment cela se passe-t-il ? Mme Moulin nous explique ainsi qu’« en général, on dépose des dossiers en amont au moment de la conception puisque, dès la conception, on doit répondre à des critères – ce qui n’était pas forcément le cas il y a deux ans et demi, avant la création de ce label – relatifs aux BEPOS ». Le label, décerné par des organismes vigilants et exigeants, « permet d’apporter une garantie et, eux, ils vont venir contrôler. Cela permet de contrôler que la théorie et la réalité du terrain convergent vraiment vers les mêmes objectifs ».

Alors que le dispositif n’en est qu’au stade de l’expérimentation, se voir décerner le label n’est pour le moment qu’honorifique mais des aides financières ne sauraient tarder : « on peut s’[y] attendre car, nous, on va plus loin que les règles applicables donc, en général, on est aidé ». A titre d’exemple, le projet mené à Malaunay s’est ainsi vu octroyer près de 20 millions d’euros à titre d’accompagnement.

Alors que « la ministre a un objectif de créer 6 000 logements sociaux répondant à ce label », les collectivités peuvent faire appel au ministère, la Caisse des Dépôts ou encore l’Union Sociale de l’Habitat car « je pense qu’il y aura sûrement un accompagnement financier » pour soutenir cet objectif nous certifie Isabelle Moulin.

Dépasser les normes BBC

A Malaunay, Territoire à Energie Positive – les fameux TEPOS -, la municipalité est fortement engagée dans la démarche de la transition énergétique et c’est cette démarche volontaire qui a mené la collectivité à participer à cette expérimentation, « on est quand même en veille réglementaire et, en tant que TEPOS, on est assez au fait de ce qui sort et de ce qui va permettre d’être en avance sur la réglementation et je pense qu’Habitat 76 – le bailleur qui a construit – est également dans cette démarche puisqu’ils ont déjà construit un bâtiment TEPOS avec 200 % d’EnR. Ils étaient déjà dans la démarche de faire mieux que les bâtiments performants d’aujourd’hui. On était donc à l’affût de cette nouvelle réglementation ». En parallèle, une veille juridique était effectuée grâce à la participation régulière à des séminaires de l’ADEME notamment.

Elément déclencheur de la participation à l’expérimentation du label Energie Carbone, la Ministre du logement Emmanuelle Cosse était venue inaugurée la résidence Alizari « et c’est en voyant les performances du bâtiment qu’elle nous a encouragé à candidater, que les délais n’étaient pas encore passés. A priori, il n’y avait pas de raison qu’il n’y ait pas un retour positif ». Ainsi, sans les encouragements directs de la Ministre, il est probable que la municipalité de Malaunay n’eut pas candidaté. Peut-être une communication à revoir afin de mobiliser davantage les projets ?

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Jusqu’ici, difficile de ne pas penser à un énième dispositif venant se rajouter à une kyrielle de précédents. En quoi se démarque-t-il des normes BBC par exemple ? « Il prend en compte notamment le niveau carbone : il y a la partie énergie positive, consommation mais il y a aussi une prise en compte des émissions carbone, des cycles de vie des matériaux, si on utilise des matériaux bio-sourcés… Il y a tous ces éléments qui se rajoutent dans le différentiel ».

En résumé, chaque nouveau dispositif dans la rénovation ou au moins l’amélioration des bâtiments a permis d’aller plus loin et ce label Energie Carbone a la même ambition : « avec les anciennes réglementations, on faisait des bâtiments un peu moins consommateurs. Après, ils étaient même avec des apports, des apports naturels puis on a intégré des énergies renouvelables… La réglementation a évolué d’année en année et aujourd’hui, on intègre les produits, le fait qu’il n’y ait pas d’émissions de solvants, que l’on produit plus que ce que l’on consomme, on recycle… L’évolution de la réglementation se veut de plus en plus performante et cela intègre maintenant les cycles de vie de la construction des bâtiments ».

Anticiper et se lancer, c’est préparer l’avenir

Rénover et être exigeant, c’est cher mais « bien sûr, aujourd’hui, cela a un coût supérieur mais regardez les bâtiments BBC : il y a cinq ans, c’était un peu plus cher mais, aujourd’hui, c’est la norme et ils ne sont plus plus chers. Aujourd’hui, on est en énergie positive et c’est un petit peu plus cher mais bientôt l’énergie positive ou au moins les bâtiments passifs seront la norme et on peut mettre un peu plus de sous afin d’anticiper les futures réglementations et être dans les critères de ces futures normes ». Ainsi, s’engager tout de suite dans la démarche permettrait d’être en avance sur les futures normes et ainsi ne pas avoir à réadapter de futurs projets.

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Un premier retour des premiers résidents a déjà été fait et il est très positif : « les premiers usagers y sont rentrés le 15 décembre. Il semblerait que, cet hiver, même sans chauffer, ils étaient à 20 degrés [dans les logements] sans aucun souci ! Donc, le confort des usagers, c’est un premier point positif et la performance fait qu’il y a très peu de consommation énergétique. Et cela va plus loin que la consommation de chauffage, c’est aussi la consommation d’électricité ».

Selon Mme Moulin, il appartient aux collectivités d’être dans ce rôle d’exemplarité, de moteur afin d’inciter particulier ou secteur privé à en faire de même : « c’est aux collectivités publiques d’être dans la démonstration et le retour sur investissement, il n’est pas uniquement financier. Il est aussi dans la qualité de vie, dans l’impulsion, dans la dynamique, on peut montrer que c’est faisable et ce quelle que soit l’échelle. Le but, c’est de montrer que c’est faisable et qu’il n’y a pas de difficulté dès que l’on veut bien s’en donner les moyens ».

Ainsi, dans le projet de la résidence Alizari, la bailleur Habitat 76 a décidé de lui-même de « mettre davantage que les sommes habituelles pour du logement social mais c’était pour montrer que c’est faisable, que la transition énergétique c’est pas de l’austérité ! On peut faire mieux et on peut voir un peu plus loin et je crois que c’est le rôle des instances publiques ».