Encore marginale, la distribution de poules aux habitants est une pratique qui présente de nombreux avantages pour ses partisans. Prévue dans une perspective de développement durable, cette initiative surpasse bien…
Encore marginale, la distribution de poules aux habitants est une pratique qui présente de nombreux avantages pour ses partisans. Prévue dans une perspective de développement durable, cette initiative surpasse bien souvent ses objectifs initiaux. De quoi permettre à cette pratique de se généraliser ?
Une méthode efficace pour réduire les déchets
C’est une idée simple qui peut paraître saugrenue à première vue : des communes organisent la distribution de poule auprès de leurs habitants. Le but, c’est de permettre la diminution du nombre de déchets. Car les poules peuvent consommer jusqu’à 150kg de déchets organiques par an. Ainsi, l’opération est en réalité un investissement rentable à moyen terme pour les communes, en plus d’être une initiative positive pour le développement durable.
En outre, ces « poules composteuses » présentent l’avantage d’être assez autonomes par rapport aux animaux domestiques et donc nécessitent moins d’efforts pour s’en occuper. Cependant, les communes font bien évidemment signer un contrat d’adoption qui engage les habitants à s’occuper et à prendre soin de ces poules, à ne pas s’en séparer pendant un certain temps afin de respecter l’objectif initial de ces distributions et surtout à ne pas les manger ! Les coqs sont souvent proscrits pour éviter les nuisances sonores pour les voisins.
Cette initiative locale a déjà séduit de nombreuses collectivités rurales ou rurbaines.
Une pratique adoptée par de plus en plus de communes
Dans le Santerre, l’opération a été réalisée conjointement par la communauté des communes Avre Luce Noye (CCALN) et le Syndicat mixte intercommunal de traitement des ordures ménagères (SMITOM). En tout, plus de 2000 poules vont être distribuées aux habitants. Il y a eu quatre distributions au mois de septembre dans différentes communes du coin. Une dizaine d’autres sont déjà prévues. Les poules sont données gratuitement par 2 et les citoyens doivent signer un contrat d’adoption. Un suivi et même un contrôle sont envisagés pour vérifier la bonne foi des volontaires. Fier de l’opération, le SMITOM a même conçu un site pour permettre « l’adoption » d’une poule en ligne. Intitulé « Pouleetic », celui détourne avec humour le concept et le visuel d’un célèbre site de rencontre en ligne. Une manière astucieuse de présenter et de promouvoir son projet.
Pour aller plus loin : rencontrez le maire de Barsac aux Journées Nationales des Femmes Elues les 24 et 25 novembre prochains !
Mais il n’y a pas que dans le Nord de la France que ce genre d’opération a lieu. En Gironde, de nombreuses communes aux alentours de Bordeaux ont fait ce choix. A Barsac, par exemple, 1000 poules ont été commandées puis distribuées. Là encore, les poules sont distribuées par pairs et les preneurs doivent signer un contrat d’adoption qui leur imposent de les conserver au moins deux ans. Contrairement à l’initiative du Santerre, les poules ne sont pas offertes mais vendues pour un euro pièce. Une manière d’amortir un peu les coûts en faisant participer les citoyens, même si l’économie et le retour sur investissement viendra au fur et à mesure par la réduction des déchets. L’achat des 1000 poules a coûté 8500 euros à la communauté des communes de Podensac.
Une pratique qui renforce l’idée de ruralité et de lien social
Selon les calculs de Philippe Meynard, ancien maire de Barsac et président de la communauté des communes de Pondensac, cet investissement va permettre d’économiser 15 000 euros, en évitant l’incinération des tonnes de déchets organiques que ces 1000 poules vont consommer. C’est un investissement efficace et à moindre coût comparé aux autres. Pour le SMITOM du Santerre, le succès de l’opération est déjà au rendez-vous et va même au-delà des attentes : il constate une diminution de 15% des déchets, alors que l’objectif était de 7%.
Mais l’intérêt d’une telle opération ne réside pas uniquement dans la réduction des déchets, même si cela demeure l’enjeu principal. En donnant des poules aux habitants, les communes comptent valoriser une certaine idée de la ruralité. Le maire de Barsac explique ainsi que beaucoup d’habitants de sa commune viennent de la ville et n’ont donc jamais eu de poules. L’opération leur offre la possibilité de profiter de cet aspect de la vie en campagne. Les poules ont d’ailleurs été soigneusement sélectionnées parmi les races pondeuses ce qui leur permettra d’avoir des œufs frais régulièrement. Un effet social est aussi encouragé : cette expérience permet la mise en relation des habitants qui ont tenté l’aventure, elle permet aux habitants d’offrir des œufs à leurs voisins, etc. Pour les enfants, les effets sont bénéfiques : ils sont pour la plupart heureux d’avoir des poules dans leurs jardins.
Des initiatives qui se diversifient
Pour renforcer cette idée de lien social, le maire de Barsac compte installer un poulailler municipal pour les habitants qui n’ont pas de jardins. Ce ne sera pas le premier. Quelques communes ont déjà un poulailler, avec toujours cette optique de baisser les déchets. Soit le poulailler est directement affilié à une école, comme à Navailles-Angos, où les restes de la cantine sont données aux poules et les œufs récupérés par la cantine, soit, comme à Villers-les-Pots, il y a une gestion collaborative des habitants.
Les initiatives ne viennent pas que des communes. A Arques, l’école Camus a accueilli trois poules, avec un double objectif ; à la fois écologique et pédagogique. L’entreprise Eggs Iting s’est spécialisée dans la conception de poulailler connecté à destination des établissements scolaires. Pour eux, c’est un outil pédagogique formidable à plusieurs niveaux : cela permet aux élèves d’apprendre la biologie à travers les poules, de découvrir la provenance de la nourriture, d’apprendre à respecter l’environnement et de s’initier aux nouvelles technologies grâce à leur poulailler connecté.