La fracture numérique est importante en France, des collectivités territoriales proposent déjà des solutions efficaces pour y remédier
Le Sénat organise aujourd’hui un débat autour de la fracture numérique. Si l’inégal accès au numérique représente un enjeu majeur en France, des collectivités territoriales proposent déjà des solutions efficaces pour y remédier.
La fracture du numérique, une réalité aujourd’hui
Aujourd’hui en France, le numérique semble faire partie du quotidien. De nombreux services administratifs et commerciaux ne sont disponibles qu’en ligne. Pourtant, tout le monde n’a pas accès au numérique ; de nombreuses inégalités sociales, territoriales et générationnelles existent et creusent cette fracture numérique. Actuellement, 500.000 Français n’ont pas accès à une connexion Internet chez eux. 13 millions sont considérés comme « éloignés du numérique » et 6.7 millions d’entre eux ne se connectent jamais à Internet. L’utilisation d’Internet témoigne également des divisions sociales : les personnes non diplômées font partie des moins connectées avec un taux de connexion de 54 % contre 94% pour les diplômés du supérieur. Par classe d’âge, ce sont les seniors de plus de 70 ans qui se connectent le moins, avec un taux de 57%. Enfin, 541 communes sont classées en « zone blanche », ces territoires où il n’y ni réseau téléphonique, ni réseau internet et plus de 3000 sont en « zone grise », là où les réseaux sont très faibles.
Pour tenter d’apporter une réponse à tous ces problèmes, le Sénat organise actuellement un débat sur « la fracture numérique et les inégalités d’accès aux services publics ». Si la situation semble alarmante, elle est loin d’être une fatalité ; de nombreuses collectivités territoriales ont déjà apporté des idées et réaliser des initiatives efficaces pour combler cette fracture numérique.
Le Club informatique des seniors : l’entraide pour réduire les fractures
À Domérat, dans l’Allier, un club informatique a vu le jour en 2012 afin de remédier à la fracture numérique. Animé par Claude Lahousse, formateur dans une école de gendarmerie, les ateliers ont lieu dans le centre social de la commune auprès des habitants qui le souhaitent. Le succès a très vite été au rendez-vous au point que le club accueille désormais des habitants des communes alentours, comme l’explique Claude Lahousse, au journal La Montagne : « Au début, il y avait plus de cent adhérents. Les gens n’étaient que de Domérat. Ils ont été formés et une fois qu’ils ont appris ce dont ils avaient besoin, ils ne sont pas forcément revenus. Comme on avait moins d’adhérents on a ouvert le club aux personnes des communes extérieures. »
Pour que les cours soient le plus efficace possible, ils sont définis en fonction des besoins et des demandes des participants. La plupart sont à la retraite et viennent pour combler leurs lacunes. Car aujourd’hui, l’usage du numérique est devenue quasiment obligatoire, comme le déplore Geneviève, une habituée du club : « On est obligé, maintenant tout se passe par Internet. Toutes les démarches sont numériques : électricité, les cartes grises, la banque… Mais c’est dur. Ce n’est pas notre génération ». Mais grâce au club informatique, elle peut désormais effectuer toutes ces démarches en ligne.
Bus Numérique en Gironde : se déplacer pour aller en contact direct des populations en besoin
Depuis 2016, en Gironde, un Bus Numérique est mis en circulation afin d’intervenir au plus près de la population en besoin. Il réalise des haltes sur le territoire girondin, en ciblant les zones péri-urbaines et rurales, davantage concernées par la fracture numérique. À son bord se trouve un formateur professionnel, mais également 12 postes informatiques. Il propose des ateliers collectifs de 3 heures qui « s’adaptent à tous niveaux et peuvent cibler des thèmes en particulier et répondre aux besoins directs des personnes ».
Fruit d’un partenariat entre la société SAS Solutions Vie Pratique, la CARSAT Aquitaine, le Conseil Départemental de la Gironde, la MSA Gironde et le RSI Aquitaine, ce bus itinérant accueille un public senior isolé pour permettre « l’apprentissage du numérique » et des outils informatiques « devenus indispensables dans leur vie quotidienne ». La formation comprend un volet pratique pour maîtriser les services en ligne des administrations mais aussi plus personnel en expliquant comment écrire un mail, partager des photos, utiliser les messageries instantanées ou les réseaux sociaux, etc. afin de « garder plus largement le contact avec la famille ou les amis ». De quoi parfaitement allier l’utile et l’agréable.
Les bibliothèques au cœur de l’inclusion numérique
Par leur présence sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones péri-urbaines et rurales, les bibliothèques et les médiathèques ont un important rôle à jouer dans l’inclusion numérique. Si elles offrent l’accès à un matériel informatique, cette mise à disposition, seule, ne suffit pas malheureusement pas à résoudre entièrement le problème de la fracture numérique. En effet, il faut que ce service soit complété par un accompagnement humain.
C’est, en tout cas, les conclusions d’un rapport en faveur d’une stratégie nationale pour un numérique inclusif. L’objectif est d’offrir « la possibilité de pouvoir disposer d’un accompagnement humain pour toutes les personnes qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas faire leurs démarches en ligne ». L’avantage que représente les bibliothèques et les médiathèques, c’est que ces structures, ancrées dans le local, ont une « une connaissance fine de la réalité des habitants et de leur familiarité avec le numérique ». Mais il faut pour cela valoriser le métier de médiateur numérique ou assurer la formation de tous les bibliothécaires et les médiateurs qui n’ont pas forcément cette compétence.
L’intergénérationnel à Albi : s’enrichir des compétences
Située dans le Tarn, la ville Albi fait du numérique, l’un des piliers de sa politique municipale. Elle s’est notamment engagée dans un projet de Smart City, destiné à définir “la ville du futur“, et met à disposition de ses habitants de nouveaux services numériques : des bâtiments intelligents, un mobilier urbain connecté, la wifi en ville, le développement de la fibre optique,… La ville propose également des ateliers, des animations, des conférences à destination de sa population, mais aussi de celle de tout le département, pour diffuser la culture numérique et permettre l’apprentissage et la maîtrise des outils numériques.
La ville fait également le pari de l’intergénérationnel pour la transmission et le partage des savoirs. Entre 2014 et 2016, l’association Logements, Entraide, Génération (LEG) a permis à une quarantaine de binômes jeunes-seniors de cohabiter : des seniors albigeois qui disposaient d’une chambre libre ont hébergé des étudiants ou des jeunes travailleurs en échange d’un petit loyer et de quelques services. Depuis, c’est une start-up qui a pris le relais de l’association. Renforcer les liens intergénérationnels, c’est aussi combler la fracture numérique et réduire les inégalités.
Le label GEN : trouver des réponses pour un futur sans fracture
Initiative du gouvernement en 2015, la création du label Grande école numérique (GEN) est destinée à combler le besoin en compétence numérique des entreprises. Faute d’une offre de formation suffisante en France, de nombreux postes dans les métiers du numérique sont à pourvoir. On estime qu’en 2022, ce nombre atteindra les 191.000.
Depuis la création du label, de nombreuses formations ont pu voir le jour. Certaines se sont fixées comme objectif de combler les inégalités professionnelles. C’est le cas de la start-up Simplon, située à Grenoble, qui propose une formation réservée aux femmes. Faustine Joly, chargée de développement territorial pour Simplon s’en explique auprès de L’Essor : « Elle est exclusivement féminine pour amener dans le numérique des publics qui sont peu représentés, ajouter de la mixité et de la diversité. » C’est le cas également de la société Handigital qui propose une formation au métier de développeur web niveau IV aux personnes en situation d’handicap. Le dirigeant de l’entreprise Fabrice Autissier explique sa démarche : « On va sélectionner des apprenants qui ont des blancs dans leur CV parfois dus à une situation handicap qui s’est contractée en cours de vie ou qui n’ont pas de diplôme car ils n’ont pas eu accès à des structures incluant leur situation de handicap ».
Depuis 2015, le label GEN a permis d’accompagner la création de nombreuses formations numériques. Accordé pour trois ans, ce label offre une subvention pouvant représenter jusqu’à 80 % du budget prévisionnel des organismes, avec un plafond fixé à 80.000 euros par formation. Aujourd’hui plus de 750 formations sont labellisées sur l’ensemble du territoire français.
Il manque PapiMamieDigital à Lyon 😉