Qui dit campagne dit communication auprès de vos électeurs. Mais comment communiquer sur les réseaux sociaux en tant qu’élu ? Nos conseils.

Qui dit campagne, que ce soit municipale, régionale, départementale ou autres, dit communication auprès de vos électeurs. Mais comment communiquer sur les réseaux sociaux en tant qu’élu ? Nos conseils.

Pourquoi faire attention aux réseaux sociaux en tant qu’élu ?

Devenus des médias particulièrement utilisés pour s’exprimer, Internet et, tout particulièrement, les réseaux sociaux sont un outil très pratique, car très simple d’utilisation, pour s’adresser à ses électeurs ou ses opposants mais ils sont également extrêmement traîtres.

Alors que l’on se sent souvent protégé par la notion de liberté d’expression, les régulières affaires médiatiques ou judiciaires impliquant des propos, des « dérapages » contrôlés ou non, nous rappellent bien vite que celle-ci a de réelles frontières qu’il ne faut surtout pas franchir même lorsque l’on est tenté par ses supporters ou détracteurs agressifs.

Si nous ne vous conseillons pas nécessairement d’opter pour le discours aseptisé et froidement factuel, nous ne saurions assez vous encourager à la prudence et à la modération au moment de publier quoique ce soit sur Internet. Pesez bien la pertinence de vos propos.

Internet, ce media ambivalent

Loin devant les autres médias, Internet est devenu le système nerveux central de la communication moderne, parce qu’il établit une prise directe et rapide, sans filtre ni prisme déformant. En quelques clics et notamment sur les réseaux sociaux, il devient un jeu d’enfant pour un élu d’interagir avec l’électorat, ses partisans, ses opposants et leurs soutiens mais aussi avec les indécis.

Quelques chiffres :

  • Facebook : 24 millions d’utilisateurs actifs mensuels et 20 millions d’utilisateurs quotidien en France ;
  • Twitter : 2,3 millions d’utilisateurs mensuels en France ;
  • YouTube : 1 milliard d’utilisateurs mensuels (Monde), nombre de vues par jour : 4 milliards, dont 25% via mobile ;
  • En France, 45% des internautes, soit 18 millions de Français, consulteraient régulièrement un blog (chiffres de 2013).

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La très grande majorité des institutions, des collectivités territoriales, des partis et de leurs candidats, des groupuscules, associations et mouvements diverses sont présents sur les réseaux sociaux. Il est donc important d’y être également pour pouvoir s’exprimer, occuper l’espace médiatique et pouvoir repérer et contrer les attaques des opposants.

Cependant, il est indéniable que l’avènement des réseaux sociaux affaiblit le débat politique. Tout simplement parce que leur format est dédié à la diffusion rapide, plutôt qu’à la lente construction. Ils invitent à la spontanéité, à l’échange. Mais leur format est inadapté à la création de valeur.

La course aux followers, la volonté d’occuper le terrain, a entraîné une baisse de la qualité des contenus au profit de la quantité. Attention, les 140 caractères permis par Twitter ne doivent pas servir d’excuse pour justifier des raccourcis.

Dans un monde saturé d’informations déferlant en ligne chaque seconde, il est nécessaire de se distinguer en apportant une réelle valeur. Pour émerger dans ce flux d’informations, vous devez régulièrement écrire et produire du contenu consistant, argumenté et circonstancié. Des publications plus longues, plus substantielles, que les lecteurs trouveront utiles et inspirantes : selon une étude américaine menée auprès d’une sélection des 1074 blogs les plus influents, une moyenne de 900 mots par publication est conseillée.


“Peur” des commentaires agressifs ? Il est toujours possible d’ignorer ceux-ci : une étude a montré que les « grands » personnages politiques n’utilisent les réseaux sociaux que comme plateforme d’expression personnelle, extrêmement rarement comme lieu virtuel d’échanges avec les citoyens (« Les réseaux sociaux et l’échange entre l’homme politique et les internautes : le cas de Facebook après les élections présidentielles en France », Galia  Yanoshevsky). Si vous souhaitez établir un vrai débat, il est conseillé d’opter pour une autre plateforme ou alors d’effectuer un important travail de modération au cas où vos opposants « attaquent ».


Rappelez-vous, tout ce qui est dit est « public » sur les réseaux sociaux surtout quand vous êtes élu

N’oubliez jamais que vos opposants n’hésiteront pas à fouiller vos déclarations passées afin de vous mettre en difficulté. Le peu d’attention qui est souvent fait aux paramètres de confidentialité des propos et des comptes Facebook ou Twitter pose une situation de grande vulnérabilité : tout le monde peut savoir ce que vous dîtes sur les réseaux sociaux, ce que vous publiez (dans la grande majorité des cas), vos supporters, les journalistes mais aussi vos opposants. Il est donc vivement conseillé d’être prêt en cas d’attaque, de pouvoir argumenter et se défendre, être mis(e) en difficulté étant bien mauvais en termes d’image.

De plus, jugez soigneusement de la pertinence de recourir à l’humour. Notion particulièrement subjective, ce qui choque certaines personnes peut en amuser d’autres et le juge peut être amené à trancher des litiges complexes, mais là encore la décision ne pourra qu’être subjective. L’humour dispose d’une large tolérance certes mais il n’existe néanmoins pas « d’impunité de principe pour l’humoriste et que la liberté d’expression doit demeurer dans certaines limites » (TGI Paris, 17eme ch., 12 janvier 1993). Cette subjectivité fait que l’on peut donc aisément glisser dans le cadre de l’injure, c’est-à-dire une « expression outrageante » ou méprisante (on voit là que la frontière est très subjective)…

« La meilleure défense, c’est l’attaque » : la modération très aléatoire des services de Facebook, Twitter, Youtube a instauré une impression de liberté d’expression totale, d’une réelle impunité (ces groupes ont d’ailleurs été rappelés à l’ordre à plusieurs reprises pour leur laxisme). Or, les frontières de la liberté d’expression sont très clairement exprimées en droit français ! Injures, diffamations, incitations à la violence ou à la haine raciale sont durement sanctionnées à condition de les dénoncer. Et c’est là où l’impression de discussions privées entre amis s’effondre si les paramètres de confidentialité n’ont pas été réglés : les propos sont consultables dans le monde entier, donc considérés comme publics selon la législation française, ce qui alourdit les sanctions. N’hésitez donc pas à poursuivre en cas de propos condamnables inadmissibles.


Bon à savoir :

Principaux textes encadrant les frontières de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux :

  • Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse : articles 23, 24, 27, 31, 32 et 33
  • Articles 225 -1, 225-2, 225-18 et 222-18-1 du Code Pénal

Le fact-checking

Très en vogue aujourd’hui (on pourrait citer la rubrique Les Décodeurs du Monde.fr qui est fondée sur ce principe), il s’agit d’une vérification quasi-systématique par les faits. Cette méthode consiste donc à vérifier et valider l’exactitude des chiffres, des informations et des affirmations non factuelles énoncés dans un texte ou un discours. Ce travail de vérification est aujourd’hui facilité par l’ouverture des open data et donc la consultation des bases de données officielles, de l’Internet sourcé et de certains réseaux collaboratifs.élu réseaux sociaux

Le travail d’analyse des discours de Donald Trump et de sa rivale Hillary Clinton a été particulièrement marquant lors de la course à la Maison-Blanche, soulignant un Donald Trump s’enferrant souvent dans des déclarations approximatives ou des rétropédalages, là où la candidate Démocrate a régulièrement évité ces pièges par une grande maîtrise des dossiers et une relative exactitude des chiffres avancés.

Alors qu’un nombre grandissant de journalistes et titres de presse, mais aussi de collectifs citoyens, s’adonnent à cette vérification systématique de tout chiffre ou information évoqué publiquement, il va donc être dorénavant exigé de parfaitement connaître son sujet et de ne pas s’en tenir qu’aux grandes lignes au risque que ce fact-checking ne taille en pièce votre discours et vos arguments. L’étiquette d’ « approximatif », d’ « enjoliveur », voire tout simplement de « menteur » , est rapidement accolée et bien difficilement effacée…