Depuis longtemps sujet à de multiples débats en France, la culture du cannabis pourrait être légalisé pour un usage médicinal. C’est en tout cas ce que parient des élus de…

Depuis longtemps sujet à de multiples débats en France, la culture du cannabis pourrait être légalisé pour un usage médicinal. C’est en tout cas ce que parient des élus de la Creuse qui souhaitent mettre en œuvre un projet de culture du cannabis pour ainsi relancer l’agriculture de leur département.

La France, un des pays les plus restrictifs en la matière

En France, le débat autour du cannabis est sensible et très complexe. Preuve en est, le positionnement du président Emmanuel Macron, qui s’est progressivement durci sur la question. D’abord prêt à envisager sa légalisation peu avant sa campagne, puis la dépénalisation, il a fini par maintenir son interdiction avec la réforme de Gérard Collomb qui met en place une amende forfaitaire automatique pour tout contrevenant.

Mais la question autour du cannabis concerne aussi son usage thérapeutique. La France reste un des pays les plus restrictifs, alors que plus d’une quarantaine d’états comme l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne autorisent le cannabis thérapeutique, prescrit sur ordonnance. Si autant de pays l’autorisent, c’est que la plante présente de nombreux avantages médicinaux. Ce serait un excellent antidouleur, très efficace pour les céphalées et autres douleurs locales. Mais elle serait aussi efficace contre les tremblements (et donc la maladie de Parkinson) contre les convulsions ou encore la sclérose en plaque.

Vers une autorisation de la culture du cannabis à usage thérapeutique ?

Ainsi, si la question de son utilisation pour un usage récréatif semble clos, celle de son usage à des fins médicales reste ouverte. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn a d’ailleurs annoncé que la France avait « du retard » sur le sujet, avant de préciser qu’ « il n’y a aucune raison d’exclure, sous prétexte que c’est du cannabis, une molécule qui peut être intéressante pour le traitement de certaines douleurs très invalidantes », ouvrant ainsi la porte à une future autorisation.

Une autorisation déjà anticipée par des élus de la Creuse qui souhaitent créer des cultures de cannabis dans leur département. Il y a peu, Eric Correia, conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine a pris l’initiative d’écrire à Emmanuel Macron pour lui demander l’autorisation de lancer des cultures expérimentales dans la Creuse. Une opération soutenue par d’autres élus du département. Tous croient aux vertus médicinales, vues comme une alternative plus douce à une autre drogue utilisée comme antidouleur, la morphine, dérivée de l’opium.

culture cannabis france
La Creuse cultive déjà du chanvre pour des usages annexes (textiles, etc.) mais souhaite étendre cette culture au cannabis thérapeutique.

Des élus creusois veulent relancer l’emploi grâce au cannabis

Il serait pourtant faux de croire que ce projet de culture du cannabis n’intéresse les élus que par conviction médical. En effet, l’exploitation du cannabis aurait surtout des vertus bénéfiques sur l’économie et l’emploi de leur département. Car c’est une véritable filière qui se mettrait ainsi en place : cette culture va mobiliser des agriculteurs, des agents de sécurité pour surveiller les exploitations, un laboratoire public pour contrôler le THC, etc. Une véritable industrie pour le territoire qui en aurait bien besoin comme le rappelle volontiers Eric Correia, au magazine Le Point, en évoquant les 18.000 emplois créés de cette façon au Colorado : «Autant vous dire que 10 % de tout ça me suffirait amplement pour la Creuse ».

Vincent Turpinat, addictologue et attaché parlementaire de Jean-Baptiste Moreau, député LREM de la Creuse rejoint Eric Correia dans ses analyses sur l’intérêt médical et économique, comme il l’a confié au journal Libération : « En tant que professionnel, je suis convaincu du potentiel santé de la molécule, en tant que politique, je suis convaincu du potentiel économique pour le territoire. Mais je suis convaincu aussi du fait qu’il y a des blocages politiques sur ce sujet en France. Il faudra du temps, de la pédagogie et ne pas mélanger les sujets entre santé et récréatif. Surtout, il faudrait que le dossier soit incarné localement. »

Un projet d’avenir pour l’hyper-ruralité ?

La Creuse est considérée comme un département en souffrance, l’un des plus pauvres de France. Pour remédier au problème, les élus creusois ont signé en octobre 2017, avec le président, un grand plan de revitalisation du territoire, intitulé « Plan particulier pour la Creuse ». Le département doit devenir un laboratoire expérimental de l’hyper-ruralité. Les mesures concrètes qui auront ainsi fait leurs preuves pourront être adoptées par d’autres territoires, considérés eux aussi comme hyper-ruraux.

C’est dans ce contexte que les élus souhaitent expérimenter la culture de cannabis à usage thérapeutique, susceptible de créer 500 à 1.000 emplois directs dès la première année. Eric Correia a demandé au gouvernement une dérogation spécifique pour la Creuse afin de pouvoir lancer l’exploitation. Sans succès pour le moment… Dans une vidéo du Parisien, il fait part de son inquiétude concernant le développement de cette culture dans les autres pays européens limitrophes alors que la demande est forte en France : « de plus en plus de personnes l’achètent à l’étranger, en Suisse, en Italie, en Angleterre et donc, cela veut dire que toute la filière économique et les emplois se créent là-bas. » En « déprise économique », la Creuse pourrait relancer l’attractivité de son territoire, comme le Colorado a pu le faire : « C’est un état qui était endetté et qui, aujourd’hui, redistribue de l’argent à sa population. »

Que ce soit sur le plan médical, en rappelant que la morphine est déjà autorisée, comme sur le plan social et économique en évoquant les bénéfices en matière d’emplois que son autorisation peut engendrer, les élus creusois sont plus que convaincants dans leurs arguments. Reste que malheureusement, le cannabis demeure un sujet tabou en France et que même s’ils rappellent que l’usage récréatif n’est pas dans leur revendication, la question est très sensible, ce qui explique l’absence de réponse concrète du gouvernement à l’heure actuelle. Espérons cependant, pour la Creuse, que leur courage politique sera finalement récompensé !