Les fêtes approchent. Dans un contexte crispé autour de la laïcité, le Conseil d’Etat a dû se prononcer sur les crèches de Noël.

Dans un contexte crispé autour des notions de laïcité, la mise en place de crèches de Noël dans l’espace public soulève depuis plusieurs années de nombreux débats sur la place des signes religieux dans l’espace public. Appelé à se prononcer, le Conseil d’Etat a tranché le 9 novembre en faveur d’une autorisation de ces installations sous des conditions strictes.

Les crèches de Noël : une tradition qui fait débat

Etablies dans les collectivités et les lieux publics depuis des décennies malgré la loi de séparation de l’église et de l’Etat, les crèches de Noël font aujourd’hui débat dans un contexte de tensions importantes autour du fait religieux et de sa place dans les lieux publics. En cause : le « deux poids, deux mesures » entre les signes représentant la religion catholique et les signes distinctifs d’autres religions. L’installation d’une crèche de Noël dans un bâtiment public contrevient-elle à la loi de 1905 exigeant une stricte neutralité de l’Etat en matière religieuse ?

Les crèches autorisées dans un contexte “artistique, culturel ou festif”

Appelé à se prononcer sur deux cas distincts en Assemblée du contentieux, le Conseil d’Etat a décidé d’autoriser ces installations, mais sous de strictes conditions. Traduction : on ne peut interdire une crèche sur le seul fondement de la neutralité de l’Etat, mais l’installation doit s’inscrire dans un « environnement artistique, culturel ou festif ».

L’interprétation de l’institution repose sur l’analyse suivante : les crèches de Noël sont aujourd’hui ancrées dans les traditions et le folkore local. Avec cette décision, le Conseil d’Etat a choisi de casser l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris qui aurait commis une erreur de principe en affirmant que ces installations sont illégales en vertu du seul principe de neutralité.

Toujours selon le Conseil d’Etat, si l’article 28 de la loi de 1905 pose l’interdiction « d’élever ou d’apposer des emblèmes ou signes religieux sur les emplacements publics », une crèche de Noël peut avoir « plusieurs significations ». L’institution détaille : « Elle présente un caractère religieux, mais elle est aussi un élément des décorations et illustrations qui accompagnent traditionnellement les fêtes de fin d’année, sans signification religieuse particulière ».

Le Conseil d’Etat opère aussi une distinction entre « bâtiments publics », sièges d’une collectivité publique ou d’un service public, et les « autres emplacements publics », où les conditions sont moins exigeantes :

  • Dans les premiers, l’interdiction est de mise sauf si son « caractère culturel, artistique ou festif » est établi.
  • Dans les seconds, tels que parvis de mairie, accès aux bâtiments publics, marchés de Noël, le feu vert est en principe accordé pendant les fêtes de fin d’année.

En résumé, selon la juridiction, l’installation d’une crèche dans un lieu comme une mairie ou un conseil général « est légale si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif, mais non si elle exprime la reconnaissance d’un culte ou une préférence religieuse ».

Des définitions assez floues qui font aisément anticiper prochainement des conflits sur l’interprétation des critères retenus par le Conseil d’État, et donc peut-être de nouveaux contentieux.