Les acteurs publics et notamment les élus doivent prendre les précautions requises lors d’une campagne électorale en matière de communication

Les acteurs publics et notamment les élus doivent prendre les précautions requises lors d’une campagne électorale en matière de communication, afin d’éviter toute action qui pourrait se solder par l’annulation du scrutin.

Les règles à mémoriser :

  • Les élus sortants, candidats à la nouvelle élection, doivent tenir compte de la limite entre l’information, au travers des supports habituels pour faire valoir un bilan, et la promotion publicitaire ou propagande politique, financée par les moyens de la collectivité qu’ils administrent, qui pourrait constituer un don prohibé.

  • Ces interdictions concernent également les collectivités dès lors qu’un de ses élus est candidat à une élection générale se déroulant sur son territoire.

  • Toutefois, la communication d’un élu candidat à une réélection n’est pas interdite si elle est objective, conforme aux pratiques habituelles et porte sur des sujets concernant la vie communale.

  • Les espaces d’expression réservés à l’opposition doivent, eux aussi, être conservés.

I – Le cadre légal applicable à votre communication en campagne électorale

A) La communication en faveur d’un candidat : prudence !

Le code électoral interdit la participation des personnes morales (dont celles de droit public) à l’exception des partis ou groupements politiques, au financement de la campagne électorale d’un candidat, sous quelque forme que ce soit.  

Ainsi les actions de communication institutionnelle en faveur d’un candidat peuvent constituer des dons à son égard : la valorisation directe ou indirecte du bilan, de l’action ou de l’image d’un élu candidat notamment à travers la promotion de l’institution est donc interdite dans les six mois qui précèdent les élections. 

B) La communication institutionnelle  

La communication institutionnelle répond à un intérêt général : celui des administrés à être informés des affaires de la collectivité. Le législateur n’a pas voulu l’interdire en période préélectorale, mais a souhaité mieux assurer l’égalité entre les candidats, qu’ils disposent déjà d’un mandat ou non.

Aussi, les candidats-élus doivent accomplir leur mandat jusqu’à la fin en conservant le droit et même le devoir, d’informer leurs administrés sur les affaires les intéressant. En parallèle, ils ne doivent pouvoir prendre aucune initiative susceptible d’être appréciée comme étant de nature à promouvoir leur action et leur personne.

Le législateur a pour cela institué des limites qui entrent en vigueur six mois avant le premier jour du mois durant lequel auront lieu les élections concernées, soit pour les prochaines municipales qui devraient avoir lieu en mars 2020, à compter du 1er septembre 2019 : celles des seconds alinéas des articles L52-1 et L52-8.

  • Au terme du second alinéa de l’article L. 52-1, « à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d’une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin ».
  • Au terme du second alinéa de l’article L. 52-8, « les personnes morales, à l’exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d’un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ».

À partir de cette date, le code électoral prohibe toute campagne de promotion publicitaire des réalisations et de la gestion des collectivités intéressées par le scrutin. Les interdictions sont nombreuses et varient selon la date du calendrier de la campagne électorale :

Interdiction pendant les 6 mois précédant le premier jour du mois où l’élection doit être organisée  Interdiction dès le jour d’ouverture de la campagne électorale et jusqu’à la clôture du second tour  Interdiction de la veille du scrutin jusqu’à zéro heure 
Interdiction de toute campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d’une collectivité sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin (art. L. 52-1) Sont interdites les affiches électorales sur papier blanc (L. 48) ou qui comprennent la combinaison des trois couleurs : bleu, blanc et rouge, à l’exception de la reproduction de l’emblème d’un parti ou groupement politique (art. R. 27) Il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents, notamment des tracts (L. 49, 1er alinéa) sous les peines prévues à l’article L. 89 (amende de 3 750 euros)
Interdiction de l’utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle (art. L. 52-1).  Interdiction de l’impression et l’utilisation, sous quelque forme que ce soit, de circulaires, affiches et bulletins de vote pour la propagande électorale, en dehors des conditions fixées par les dispositions en vigueur (art. L. 240). Les infractions à ces dispositions sont passibles d’une amende de 3 750 euros et d’un emprisonnement de six mois ou de l’une de ces deux peines seulement (art. L. 246).   Interdiction de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale (art. L. 49, 2ème alinéa) sous les peines prévues à l’article L. 89 
Interdiction du recours à tout affichage relatif à l’élection en
dehors des emplacements réservés à cet effet, sur l’emplacement réservé aux autres candidats ainsi qu’en dehors des panneaux d’affichage d’expression libre lorsqu’il en existe (art. L. 51). Les infractions à ces dispositions sont punies d’une amende de 9 000 euros (art. L.
90)
Interdiction de tout affichage relatif à l’élection sur  l’emplacement réservé aux autres candidats ou listes, passible d’une amende de 9 000 euros (art. L. 90).  
Interdiction du fait de porter à la connaissance du public par une liste ou à son profit un numéro d’appel téléphonique ou télématique gratuit (art. L.  
50-1).
   

II – Précaution ne signifie pas interdiction : il convient juste de différencier campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d’une collectivité intéressée et communication institutionnelle

La notion de campagne de promotion publicitaire n’a pas été définie par le législateur. Aussi, rassurez-vous, toute action de communication portant sur les réalisations, les actions ou la gestion d’une collectivité intéressée n’est pas une campagne de promotion publicitaire au sens de l’article L52-1 alinéa 2 du code électoral. 

De manière générale, une campagne de communication devra être regardée comme prohibée lorsqu’il apparaît qu’elle a pour effet direct ou indirect de valoriser les succès d’élus briguant un nouveau mandat électoral.

Pour ne pas être interdite, la communication de la collectivité devra rester objective, neutre, conforme aux pratiques habituelles et devra porter sur des sujets concernant la vie communale. 

À la lecture de la jurisprudence électorale, plusieurs critères semblent guider le juge pour déterminer si une activité de communication de la collectivité a servi à rassembler des suffrages autour d’un candidat ou si, au contraire, elle n’a servi qu’à informer les administrés sur les affaires locales :

  • L’antériorité : l’action de communication ne doit pas avoir été créée spécifiquement en vue des élections
  • La continuité et l’identité du support : la collectivité peut continuer les actions de communication régulièrement organisées mais ne peut en modifier la forme et la fréquence
  • La neutralité du continu : l’information délivrée dans les campagnes de communication ne doit comporter que des messages neutres et à caractère strictement informatif

Ainsi il est vivement conseillé de ne pas réaliser de trop grands changements à l’approche des élections : les manifestations et l’ampleur des événements doivent aussi rester identiques à ce qu’ils étaient durant le mandat. 

  • Le juge administratif a retenu que constitue une violation de l’alinéa 2 de l’article L521 du code électoral l’inauguration d’une bibliothèque municipale, en présence d’un ministre, deux mois avant le scrutin.
  • En revanche, il est admis que la participation du maire sortant à des inaugurations, vernissages, remises de médailles, compétitions, spectacles scolaires quelques semaines avant le scrutin, fasse partie des activités normales d’un maire en cours de mandat. Il ne s’agit donc pas de support à des actions de promotion du candidat ou du programme électoral de sa liste. (TA de ROUEN, 4 janvier 1996, élections municipales de Gisors).

De même, ce n’est pas le moment de créer un site internet, ou de changer la maquette des lettres d’informations publiées par la collectivité. 

  • Constituent ainsi une campagne prohibée des initiatives nombreuses, répétées mettant en valeur l’action de la collectivité : intensité accrue de la publication du magazine municipal, quatre numéros spéciaux consacrés à mettre en valeur l’action municipale, dont le bilan de la municipalité, réitérations d’inaugurations. (CE, 10 juillet 2009, élec. De Briançon)

Pour les réseaux sociaux là encore les élus doivent faire preuve de vigilance : il est notamment conseillé de différencier les profils ou pages de l’élu et de la collectivité. L’élu candidat a tout intérêt à avoir un compte dédié et à ne pas profiter de celui de la collectivité pour faire sa promotion.

  • Le Conseil d’Etat a ainsi considéré que l’utilisation d’une page Facebook au nom de la mairie par le maire sortant a constitué une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin dès lors qu’elle mélangeait des informations institutionnelles et des éléments de propagandes de nature à créer une confusion dans l’esprit des électeurs. CE 22 octobre 2014.

III – La communication des élus de l’opposition lors d’une campagne électorale

Depuis la loi du 27 février 2002, dans les communes de 3 500 habitants et plus (et, à partir de 2020, dans les communes de 1 000 habitants et plus, en vertu de la loi « Notre » du 7 août 2015), lorsqu’il est diffusé un bulletin d’information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, quelle qu’en soit sa forme, un espace doit être réservé à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale.

Cet espace d’expression réservé est garanti par les dispositions de l’article L2121-27-1 du Code général des collectivités, décider de suspendre la publication des tribunes libres serait donc illégal (CE 27 juillet 2015).

Toutefois, la prohibition de l’article L. 52-1 alinéa 2 du Code électoral portant sur la communication relative aux réalisations ou à la gestion d’une collectivité intéressée par le scrutin concerne aussi bien les élus de la majorité que ceux de l’opposition.

Afin d’éviter toute contestation, il est recommandé que les élus concernés, et le groupe auxquels ils appartiennent, veillent, en période électorale, à une certaine neutralité dans le choix des sujets abordés et s’abstiennent de prises de positions électoraliste, partisanes et polémiques. A défaut, le juge de l’élection ne manquerait pas de caractériser, voire de sanctionner, une méconnaissance de ces dispositions.

IV – Les sanctions encourues

Certaines sanctions sont strictement attachées à la méconnaissance de l’article L52-1 du code électoral ou L52-8, tandis que d’autres peuvent être prononcées indifféremment en cas de méconnaissance de l’une ou l’autre de ces dispositions.

A l’occasion d’un recours devant le tribunal administratif dirigé contre les élections, le candidat risque : l’annulation de son élection (au cas où il en aurait été le candidat victorieux et si l’irrégularité a pu être de nature à en fausser le résultat) et 75000 euros d’amende en cas de méconnaissance de l’article L 52-1 du code électoral.

Pour aller plus loin : comment gérer le financement d’une campagne ?

Les acteurs publics doivent également maîtriser les règles propres au financement des campagnes électorales, lisez notre fiche relative au financement des campagnes électorales pour en savoir plus sur ces règles.